- 29 janvier 2025 en salle
- 2h 20min
- Biopic partiel, Drame, Musical
- Avec Timothée Chalamet, Edward Norton, Elle Fanning
L’histoire : New York, 1961. Alors que la scène musicale est en pleine effervescence et que la société est en proie à des bouleversements culturels, un énigmatique jeune homme de 19 ans débarque du Minnesota avec sa guitare et son talent qui changeront à jamais le cours de la musique américaine
Si les étoiles n’apparaissent pas, reportez-vous à la fin de l’article
Il chante « Tambourine man », l’homme-orchestre qu’il est devenu au fil des générations qui n’ont cessé de se bousculer pour suivre, comprendre ou rejeter, un artiste plus qu’exceptionnel, hors-norme. Ce que rappelle avec délectation, James Mangold, qui une fois Johnny Cash remisé dans sa filmographie ( « Walk the line ») s’attaque à une légende encore plus symbolique de la musique américaine.
Toujours vivante, affutée à l’histoire des USA qu’elle a su contrarier, aménager, et quasiment s’approprier à travers un répertoire fortement enraciné dans les profondeurs de ce pays aujourd’hui à la dérive.
A-t-il pu s’en préserver ce gamin du Minnesota que l’on voit débarquer à New-York , sa guitare sous le bras, via l’hôpital où Woody Guthrie peine à vivre ? Robert Allen Zimmerman rencontre là son héros, mais aussi une autre personnalité de la country music, Pete Seeger (Edward Norton), qui veille sur son ami malade. A partir de ce jour, leurs histoires désormais indissociables scellent le destin d’un courant musical en pleine évolution.
Sous la férule du jeune Bob, attentif aux conseils du grand frère, mais déjà en quête d’autres sons, d’une écriture plus incisive, d’un regard plus prégnant sur le monde qui l’entoure. Il vit un temps avec Joan Baez (Monica Barbaro) à qui il déclare que ses chansons sont « des aquarelles pour cabinet dentaire« .
Le ton est donné, leur duo explosif quand au festival de Newport ils règlent leur compte à travers une chanson très allusive. Festival qui couronne chaque année un peu plus un talent en dispersion totale. Dylan est désormais célèbre, parano et égo dans les bagages, talent débordant.
Une submersion qu’il endigue de manière plus que radicale en passant de la guitare sèche et solitaire à l’électrification de l’instrument, accompagné d’un groupe Révolution totale. Fâcherie persistante avec Pete Seeger. Le public de Newport le rejette, l’insulte, ( « tu n’es qu’un traitre » ) et l’applaudit chaleureusement au bouquet final. Seul sur scène, cette fois, il interprète ce qui apparait pourtant comme un camouflet : « Laisse les morts derrière toi, ils ne te suivront pas » .
La séquence est terriblement bien filmée par James Mangold , terriblement bien jouée par Timothée Chalamet qui surpasse là , son interprétation déjà extraordinaire d’un Dylan plus vrai que Dylan.

Je me suis bien régalé de toutes les titres repris sur scène, ou en studio, par un comédien accompli dans un film à générations d’étages. La version « primitive » de « The house of the rising sun » par Joan Baez est un bonheur. Monica Barbaro chante elle-même tous les titres du film.
L’impact de « Times are changing » sur le public qui découvre ce titre pour la première fois au festival de Newport, est subjuguant . « On rajeunit le visage de la folk » se réjouit Pete Seeger « une nouvelle voie s’ouvre ». Une voix qui n’en finit pas de nous parler !

- Country, vous avez dit country ? Ou plutôt folk !
Le Film
Il y aurait tant à dire sur le phénomène qu’est ce film au sujet d’un plus que phénomène : Bob Dylan . C’est la première partie de sa vie ( jusqu’aux années soixante-dix ) que raconte avec délectation James Mangold qui avait auparavant déjà réalisé « Walk the line » sur Johnny Cash. Un artiste que l’on retrouve d’ailleurs en bonne place sur le carrousel des chanteurs qui balisent le terrain du petit jeune qui va leur montrer comment on écrit la vie qui va. Affutée à l’histoire des USA, Bob Dylan a su la contrarier, l’aménager, et quasiment se l’approprier à travers un répertoire fortement enraciné dans les profondeurs du folk et de la country qu’il va révolutionner tranquillement, avant de faire exploser le mouvement. Pete Seeger, se fâche ( ils étaient très liés ), Joan Baez peine à comprendre son ancien compagnon, et le monde de la musique prend position sur un chant de bataille dont l’auteur parait se moquer complètement. Ego et parano dans les bagages, il entend poursuivre son chemin comme il l’entend. Et l’avenir lui donnera raison. Comme il ne devrait pas contredire Timothée Chalamet dans l’interprétation totale , hors-norme de ce personnage qui le demeure toujours. Tout l’entourage est du même acabit, avec un petit plus peut-être pour Boyd Holbrook en Johnny Cash ( réincarné)
Totalement d’accord, c’est un pur bonheur de retrouver les débuts de Dylan, il est déjà ce personnage en même temps génial et si peu agréable qu’il a toujours été. Fort heureusement, James Mangold et Timothée Chalamet ne l’ont pas rendu sympathique.
C’est très bien vu de ne pas avoir essayé de balayer toute la vie de Dylan, c’était trop ambitieux, et le film est cohérent, on s’arrête au moment où Dylan franchit la ligne rouge de l’électrisation du folk, cette transgression devient une véritable renaissance et reconnaissance pour cette musique.
Chalamet est excellent, il n’en fait jamais trop, les seconds rôles sont au diapason (c’est un film musical). Mention spéciale à Monica Barbaro qui chante divinement bien Joan Baez et à l’interprète de Woody Guthrie bouleversant.