La fiche du DVD / Blu-Ray
Le documentaire
Les bonus
La petite fille de Robert Doisneau a voulu dit-elle donner une autre image de son grand-père. Oublier les clichés, effacer les stéréotypes… C’est une autre histoire qu’elle nous raconte alors, une histoire de famille, avec le regard de sa maman et de sa tante, Annette et Francine, les filles du photographe qui dans l’atelier entretiennent la mémoire et le souvenir.
Le fil du temps est furieusement chronologique. Car Doisneau ne s’est pas imposé du jour au lendemain, chantre du noir et blanc. C’est l’époque qui veut ça et l’enfance portée par des rêveries sans artifice : des jeux sur les trottoirs déserts, dans les arrière-cours ou sur les gravats d’une France en reconstruction.
Quand il vole de ses propres ailes, appareil photo en main, le voici chez Renault, « la seule et unique fois qu’il sera salarié » relève le commentaire assuré par la réalisatrice avec un brin de naïveté. Clémentine Deroudille demeure la petite fille, toute émue, reconnaissante, admirative, devant l’œuvre de cet homme, son grand-père avant tout.
Quelqu’un de très simple, un peu timide aussi. Robert Doisneau respectait beaucoup les autres. Il n’a pas photographié le mouvement social de 1936 : « dans l’usine j’aurais eu l’air d’être un indicateur » dit-il en rêvant « d’envoyer valser tous ces décors de petits bourgeois ».
Pendant l’occupation il refuse « de montrer l’indicible » poursuit la réalisatrice qui joint à la parole des photos de l’auteur, parfois sorties de leur contexte, mais toujours dans l’esprit d’un homme préoccupé par le monde qui l’entoure.
Il le répète à plusieurs reprises,le sien ne va pas au-delà de la périphérie parisienne, et le marché aux puces, puis celui des Halles, sont des repères indispensables, presque quotidiens. Il s’y promène, le sourire aux lèvres et le regard accroché à tout ce qui bouge. Il ne photographie pas beaucoup « car il faut apprendre à disparaitre pour mieux cadrer ».
La querelle a fait long feu. Clémentine Deroudille en profite pour y mettre un terme définitif. « Le baiser de l’Hôtel de ville », le fameux baiser qui sera son premier cliché à dépasser les frontières, c’est de la mise en scène, une commande d’un magazine américain sur l’amour en France. Robert Doisneau embauchera deux comédiens qui ne jouaient pas la comédie.
Tout un décor pour une vie qui défile au milieu de ce nouveau cénacle, celui de la consécration et des honneurs. Photographe chez Rapho, où il entre à sa création en 1946, Robert Doisneau rejoint « une famille d’esprit et de partage d’un regard », une photographie humaniste avant d’être éventuellement celle d’un scoop…
Une famille rejoint par toute une kyrielle d’artistes. Des écrivains posent des mots sur ses photos. Ils deviendront ses amis : Blaise Cendrars, Philippe Delerm, Daniel Pennac ou Prévert qui prête sa plume mais aussi sa silhouette dans les rues de Paris que les deux compagnons arpentent joyeusement.
De beaux clichés peu à peu effacés par l’apparition d’une couleur que le photographe aborde nous dit-on avec gourmandise. Pourtant, confronté au modernisme et à l’innovation architecturale, Doisneau perd à mes yeux, ses repères et l’âme du poète et du témoin qu’il fut. « Je montre de la vie la facette qui m’arrange et comme c’est une photo ça devient indéniable » dit-il amusé à Bernard Pivot . Amusé ! Son regard, son sourire et la voix qui chantonne…
- A voir également : « Robert Doisneau, tout simplement » de Patrick Jeudy.
LES SUPPLEMENTS
- Interview de Clémentine Deroudille. La petite fille de Robert Doisneau explique les intentions de son projets en révélant « des travaux passés sous silence, et afin de casser les stéréotypes ». Dire certaines vérités peu connues ou reconnues .
« Si ça n’avait tenu qu’à lui tout serait en couleur. (… ) Il réfutait l’instantané, car il travaillait énormément avec la lumière, il travaillait son cadre , la pose. (…) Moi je vivais avec un monsieur qui cherchait les commandes, qui avait besoin de gagner sa vie. Il vivait en banlieue, ce n’était pas « la Tour Eiffel » qu’il est devenu par la suite, c’était le quotidien des photographes indépendants, ce dont je témoigne ».
« J’ai enfin voulu faire un film qui montrait un homme qui fait du bien ».
- Scènes coupées-La projection. La famille assiste à la projection d’un film super 8, où les spectateurs se reconnaissent dans les enfants d’hier qui posent pour le papa, le tonton, le papi. L’un des clichés les fait bien rire surtout « qu’elle a bien rapporté », la presse communisme et catholique la réclamant à part égale. La photo à la façon de « Zazie dans le métro » retient aussi l’intention, « une photo complètement bidonnée » sourit sa fille.
Hervé Hudry, le tireur, passionnante rencontre avec le tireur attitré de Doisneau qui évoque son travail, sa technique et la manière de considérer chaque fois le tirage en noir et blanc comme une pièce unique. La beauté du tirage argentique…
Le tatoueur, un développement du court passage réservé dans le documentaire
- La petite minute de bonheur de… « Je suis toujours en état de culpabilité quand je me sens heureux…
Le documentaire
Les bonus
Ce que j’apprécie particulièrement dans ce très beau portrait doublé d’une rétrospective historique sur la France, ce sont ces vidéos d’époque confrontées aux photos de Doisneau, les bistrots la nuit, le marché des Halles, ou bien encore Maurice Baquet et son violoncelle égarés dans la capitale. L’un en mouvement regarde l’autre figé mais tellement vrai, expressif dans la naturalisation du portrait, de l’objet. On a tellement dit et écrit sur Robert Doisneau qu’il est devenu une belle légende, une suite de clichés et de stéréotypes que sa petite fille a voulu gommer à travers cet émouvant portrait de famille qui nous raconte une autre histoire sur un homme célébré dans le monde entier et qui demeure toujours à ses yeux son grand père. A travers son regard et celui de ses filles Annette et Francine qui dans l’atelier entretiennent la mémoire et le souvenir d’un artiste.
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