Synopsis: L'inspecteur Antoine est chargé d'enquêter un soir de Noël sur l'assassinat du vieux Brignon. Son enquête le mène dans les milieux du music-hall et des photographes. Il fait ainsi connaissance de la pétulante chanteuse Jenny Lamour et de son mari qui l'accompagne au piano, et que l'on suspecte pour sa jalousie...
La fiche du DVD / Blu-Ray
Le film
Le bonus
- D’après le roman éponyme de Stanislas André Steeman.-
- Ce dvd est intégré dans le coffret Clouzot
Lieu emblématique de la police parisienne, le 36 Quai des Orfèvres aujourd’hui transféré aux Batignolles, inspire le cinéma français. Il est cette fois un alibi confortable dans un récit qui navigue entre l’ancienne place forte parisienne et le monde du music-hall.
Jenny Lamour la bien nommée y pousse la ritournelle aux côtés de son mari de pianiste, jaloux comme un tigre. Quand on s’approche trop de sa belle, l’homme voit rouge. Un jour, il menace même le prétendant d’une mort prochaine. L’intéressé (Charles Dullin) est un vieux libidineux, agent artistique réputé sur la place pour ses agissements déplacés et ses conquêtes forcées.
Nous sommes en 1947. 70 ans plus tard, le boomerang de l’actualité siffle à nouveau au-dessus de nos têtes ébahies par tant d’à-propos circonstanciés. Quand l’homme est retrouvé mort, la police entre en action, et particulièrement son inspecteur principal : Louis Jouvet en comparse de première.
Le film qui jusque-là traînait nonchalamment sa flemme dans un Paris de débauche amusée vire au mélodrame. La cérémonie prend un autre ton, plus inquiétant sur les injonctions d’un Jouvet aussi bizarre qu’intriguant. Suspicieux au possible, ses réflexions portées par des dialogues mitonnés écrasent chaque fois la personnalité des suspects.
La chanteuse enamourée (Suzy Delair), le pianiste malheureux (Bernard Blier) et Dora, l’artiste photographe dont son amitié avec le couple laisse perplexe. Est-elle amoureuse de l’homme ou de la femme ? Henri-Georges Clouzot plane habilement sur le sentiment ( un profil lesbien rare à cette époque) avant de pousser la blonde platine (Simone Renant) dans les bras d’un autre homme dont on ignorait l’épanchement.
Le 36 nous en réserve ainsi encore de bien belles, des refrains gais et coquins avec « son p’tit tralala », des interrogatoires policiers aux vertus littéraires (voir et entendre la façon dont Jouvet traduit les propos du suspect en aveux, c’est grandiose) et des mains baladeuses qui décidément font florès.
La musique est omniprésente (quasiment pas un plan sans un ronflement) et les interprètes ne le sont pas moins, sans excès dans le jeu et la psychologie. Henri Georges Clouzot la joue moderato. Avec Jouvet au tempo, libéré, inspiré. Du grand Jouvet !
LE SUPPLEMENT
- L’apogée criminelle d’Henri Georges Clouzot (30 mn). Plusieurs spécialistes interviennent sur l’histoire du film et celle de son réalisateur, dont Noël Herpe, commissaire de l’exposition « Le Mystère Clouzot », l’un des intervenants parmi les plus intéressants, à mon avis.
On raconte qu’à l’époque Clouzot « a besoin de se relancer. Interdit de tourner par la commission d’épuration pour avoir travaillé avec la Continental, une société à capitaux allemands » il est par ailleurs celui qui a signé « Le corbeau ».
Marc Godin est formel « on lui a cherché des ennuis. C’est un film contre l’occupant mais qui ne montrait pas une France très sympathique, avec un climat de délation appuyé ».
Clouzot réussit néanmoins à reprendre les chemins des studios avec l’idée d’une adaptation de « Légitime défense » toujours du fameux Stanislas-André Steeman. Aucun exemplaire n’est disponible, il pense pouvoir le faire de tête, avant d’arrêter son choix sur « Quai des orfèvres » du même romancier belge.
Clouzot passe trois semaines au Quai des orfèvres, assiste à des interrogatoires, se documente, reprend dans le scénario des dialogues entendus sur place. « C’est la première fois qu’un réalisateur qui allait parler de nous venait sur place » dit-on dans la grande maison où le contrat est simple. On ne lui ferme aucune porte, il soumet son découpage. Ça fonctionne, sauf sur une scène (le retrait de permis de conduire) qu’on lui demande de supprimer et dont il ne tient absolument pas compte. (Voir la vidéo ci-dessus)
Bertrand Blier, le fils du pianiste malheureux, dit au final tout le bien qu’il pense de ce film, « un chef d’œuvre » assure-t-il . Il le revoie au moins une fois par an.
LE COFFRET
« L’assassin habite au 21 » (1942)-« Le corbeau » (1943)-« Quai des Orfèvres » (1947)-« Manon » (1949)-« Retour à la vie » (un sketch, 1949)-« Miquette et sa mère » (1950)-« Le salaire de la peur » (1943)-« Les diaboliques » (1954)-« Le mystère Picasso » (1956)-« Les espions » (1957)-« La vérité » (1960)-« La prisonnière » (1968)
Le film
Le bonus
A la manière de Jouvet qui fait son Jouvet, on ne peut être que subjugué par cette ambiance de film pas tout à fait noir, qui entre music-hall et commissariat de police navigue subtilement dans les travers de l’âme humaine. Clouzot se saisit d’une intrigue criminelle pour mieux répertorier ses personnages sur l’échiquier de la comédie humaine. Hasard de l’actualité, il est beaucoup question de mains baladeuses dans le milieu du spectacle avec l’assassinat d’un agent artistique, vieux libidineux qui avait donné rendez-vous à l’une de ses nombreuses conquêtes, dans son domaine particulier. Les dialogues sont souvent savoureux, le récit est parfaitement mené par un réalisateur qui la joue assez moderato avec l’ensemble de son casting, laissant le soin à Jouvet d’emballer la cérémonie avec l’à-propos qui lui sied. On se la joue tactique ? l’affaire est plaisante. AVIS BONUS Une demi-heure autour du film, c'est vraiment intéressant
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