Synopsis: Un conducteur de Jeepney philippin rêve d’émigrer aux Etats-Unis pour devenir astronaute. Il fantasme un occident idéalisé tout en dressant un portrait affectueux de la culture populaire de sa province. En compagnie d’un américain, il part à Paris avec son Jeepney ...
La fiche du film
Le film
Le bonus
- Dvd : 9 décembre 2020
- Acteurs : Mang Fely, Kidlat Tahimik, Dolores Santamaria, Georgette Baudry, Katrin Muller, Hartmut Lerch
- Sous-titres : Français
- Studio : Megaphone
Prix Fipresci, Festival de Berlin
Meilleur dvd Décembre 2020 (10ème)
Entre Chaplin et Tati, à ce jour, je crois que l’on n’a pas fait mieux. Et ce jour a très bien vieilli. « Perfumed Nightmare » date des années soixante-dix, quand Paris se réveillait chaque matin au son des marteaux piqueurs et des tractopelles.
Ce dont témoigne Kidlat Tahimik en quittant son petit village philippin en quête du grand Ouest et de ses chimères. Comédien, réalisateur et rêveur, ce jeune homme les ignore, pleinement émerveillé par la planète yankee.
Pour lui faire allégeance, il crée une association Werner von Braun, l’ingénieur allemand, constructeur de la première fusée. Il veut devenir astronaute. La mise en œuvre du projet est très drôle, et forcément lunatique.
L’image parfois approximative a du grain à moudre . L’effet s’estompe tranquillement pour une vision surréaliste d’un monde que Kidlat ( le personnage ) idéalise dans un contexte onirique.
Plusieurs séquences demeurent mémorables. Une réunion internationale au sommet se tient près du village de notre héros. Le représentant américain menace de se retirer si son pays n’obtient pas le leader chip. Ce qui est le cas, alors il s’en va…
On en rigole encore même si sa maman le rappelle à l’ordre de l’oncle Sam. « Nous sommes devenus une propriété américaine » lui dit-elle en évoquant comment était son père « Un jour un étranger souriant lui a donné un fusil… » .
La Révolution, la fuite des Espagnols, l’arrivée des Américains. Ou comment planifier l’histoire philippine en quelques ritournelles. L’une d’entre elles raconte la fabrication des Jeepney, avec la remise en forme des véhicules de guerre .
Ça tient du documentaire dans un plan où Kidlat Tahimik réussit admirablement à mêler la fiction à des images d’archives.
Tout l’esprit de sa construction mentale et filmée pour dire que le monde qu’il imaginait n’existera peut-être jamais quand les forêts disparaissent pour des autoroutes et que les marchands des quatre-saisons ferment leurs échoppes parisiennes, au profit des marchés qui se laisseront avaler par des supermarchés.
Faux primate à la découverte de Paris, et du monde entier , Kidlat comprend la dérision de ses rêves , et retourne à l’essentiel. Son chez soi, auprès de sa mère. Comme une évidence, une vérité première.
LES SUPPLEMENTS
- Une rencontre avec Kidlat Tahimik ( 52 mn ). C’est un beau conteur, et son film nous donne tellement envie d’en savoir plus , alors tout baigne .Dommage seulement que ses propos ne soient pas illustrés de temps en temps par des images, des vidéos, des extraits de film comme « L’énigme de Kaspar Hauser » où il a un petit rôle
« Mon film est autobiographique au sens où je découvrais la puissance coloniale américaine aux Philippines, et toutes nos institutions occidentalisées . (… ) Mon film traite du fait de grandir dans un cocon de rêves américains ».
Comment en est-il arrivé à la réalisation, lui l’économiste de l’OCDE ? « J’en avais marre de ce métier (.. ) et arrivé pour les Jeux Olympiques à Berlin j’ai eu l’occasion d’aider un élève de l’école de cinéma qui m’a demandé ensuite de faire une petite prestation dans son film de fin d’études. Quand il a fallu tourner, son professeur était absent, on nous a dirigé vers le professeur remplaçant ». Un certain Werner Herzog
« Le désespoir de ne pas avoir de budget vous donne de la liberté »
10.000 dollars, 40 bobines, les trois-quarts sont périmés … le caméraman joue l’américain, et le réalisateur le rôle principal. « Je comptais sur les sentiments des villageois pour porter l’histoire »
Le film
Le bonus
Un film presque inconnu, réalisé avec des bouts de ficelles et sur lequel il y aurait tant à dire. La longue interview qu’il donne en bonus comble un peu ce besoin de raconter tout le film, son histoire et l’idéologie qu’il sous-tend. Celle d’une critique raisonnée à l’égard du néo-colonialisme et des valeurs qu’il transmet à tout jamais. Ca fait très sérieux mais Kidlat Tahimik qui joue et met en scène le fait avec une humeur tatinesque et une malice chaplinesque. Un burlesque de bon aloi sur une pellicule parfois hasardeuse labellisée au gros grain du 16 mm. L’effet s’estompe pour une vision surréaliste d’un monde que Kidlat ( le personnage ) idéalise dans un contexte onirique. Plusieurs séquences demeurent mémorables dans cette vision composite où Tahimik réussit admirablement à mêler la fiction à des images d’archives. Tout l’esprit de sa construction mentale et filmée pour dire que le monde qu’il imaginait n’existera peut-être jamais.