L’histoire : Judith mène une double vie entre la Suisse et la France. D’un côté Abdel, avec qui elle élève une petite fille, de l’autre Melvil, avec qui elle a deux garçons plus âgés. Peu à peu, cet équilibre fragile fait de mensonges, de secrets et d’allers-retours se fissure dangereusement. Prise au piège, Judith choisit la fuite en avant, l’escalade vertigineuse.
J’ai peu adhéré à ce film dont le titre à l’anglaise ne reflète en rien une intrigue à tiroirs dans laquelle l’héroïne se dilue. Virginie Efira tient le rôle à la hauteur de son talent, mais son personnage se perd dans son propre mensonge, sa double vie, entre deux pays et d’autres, inventés par duperie.
De la Suisse à la France, Judith possède deux foyers, l’un assuré auprès de son mari Melvil (Bruno Salomone) et leurs deux garçons, l’autre indistinct aux côtés d’Abdel ( Quim Gutiérrez)et sa petite fille dont elle prend bien soin.
Cet attachement, c’est son drame et celui d’une gamine elle-même ballotée entre cette femme qui n’est pas sa mère, et qui pourtant la réconforte comme une maman.
La confusion et la tromperie actent le quotidien de Judith, traductrice européenne très recherchée. Ce qui lui permet de jongler avec les villes et les capitales auprès d’Abdel et Melvil à priori conscients de son manège.
Ils se sont appelés, elle l’apprend et perd encore un peu plus pied dans ce labyrinthe qui se referme sur elle-même. Lors d’un contrôle de police ces nombreuses fausses identités lui sont un jour fatales. Son faussaire (Nadav Lapid) va à son tour la remettre à sa place sur le respect qu’il exige de cette femme d’une classe sociale bien supérieure à la sienne.
Judith est cernée. Elle sombre dans une folie dramatique, au point de tout briser dans sa tête et son environnement. L’hystérie la plus totale, la plus incontrôlable dans un scénario qui en ouvrant chaque fois un nouveau tiroir emmêle les situations.
La mise en scène est tout aussi brouillonne et tourbillonnante, qui de l’étale à l’embrasement ne retient pas les codes sous-tendus du suspense . Les tourments de cette femme ne me touchent pas, tant la démesure grandissante du propos parait hors d’atteinte d’une ligne scénographique cohérente.
Une perspective « hitchcockienne » dénaturée par le manque de naturel, voire de simplicité. Reste Virginie …
LES SUPPLEMENTS
- Rencontre avec le réalisateur ( 28.30 mn ) – La manière dont il imagine un nouveau film est assez particulière, voire fascinante. Comment ne pas être réaliste et façonner l’image de son héroïne , se demande-t-il.
« Mentir à ce point-là, c’est complètement délirant, et toutes les situations sont susceptibles d’être une catastrophe. Pendant l’écriture la tension est apparue, mais ce n’était pas encore un thriller, c’est au montage que le potentiel tendu et dynamique est apparu »
Le titre ? Le plan-séquence d’ouverture ? « Ca fera sens à un moment et si on accepte cette règle du jeu, ça fonctionne dans le film… » Antoine Barraud développe alors tout l’esprit de son film, et la manière dont se comportent les personnages, leur caractère, leur identité …
- « Son of a gun » de Antoine Barraud et Claire Doyon –Avec Joana Preiss, Leo Fitzpatrick-(12 mn -2011)-New York, une jeune fille ensanglantée, inerte. Près des quais, un homme assassiné sur le bitume. Ils jouent à mourir pour des scènes de crimes imaginaires.
Il est heureux que le réalisateur présente ce court-métrage où l’on voit courir des jeunes gens, simulant des agressions, et des postures macabres. Les explications d’Antoine Barraud éclairent un peu le processus, habile plaidoyer pour une abstraction du cinéma.
Le Film
Les bonus
Du mal à rentrer dans cette histoire. J’ai très vite perdu le fil d’une intrigue qui bien qu’évidente m’apparait brouillonne et faussement « hitchcockienne ». Sans la présence forte et convaincante de Virginie Efira, l’une des meilleures actrices européennes de ces dernières décennies (« Un amour impossible », « Adieu les cons », « Sybil », « Continuer » … chaque fois un nouveau registre, et toujours à sa place) je n’aurais pas tenu la distance.
Lorsque le mystère se lève sur la double vie de l’héroïne, le malaise initial devient déprimant face à son inconstance et son absence de réalisme. A ce stade, on peut évaluer la psychologie de l’intéressée, tout en se référant à une option plus médicale sur son état mental.
Elle sombre dans une folie dramatique, au point de tout briser dans sa tête et son environnement. Pour arriver à l’hystérie la plus totale, la plus incontrôlable même dans un scénario qui en ouvrant chaque fois un nouveau tiroir à énigmes ne parvient pas à clarifier les situations.
La mise en scène est en cela très tourbillonnante, qui de l’étale à l’embrasement n’arrive pas à fixer selon moi les codes sous-tendus par le récit autour de la personnalité de Judith. Les tourments de cette femme ne me touchent pas, tant la démesure grandissante du propos parait hors d’atteinte d’une ligne scénographique cohérente.
J’en reviens à l’idée « hitchcockienne » ici dénaturée par le manque de naturel, voire de simplicité. Mais, Virginie quand même …
AVIS BONUS
Rencontre avec le réalisateur ( très intéressante) doublée d’un court métrage très énigmatique sans les explications de son auteur.