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« Huit heures ne font pas un jour » de R.W.Fassbinder. Critique DVD-cinéma

Synopsis: Les Krüger-Epp :  famille typique de la classe ouvrière de Cologne. Tout le monde est là pour fêter les soixante ans de la grand-mère, une veuve un peu fantasque qui vit chez sa fille, son gendre et son petit-fils Jochen, qui par le plus grand des hasards revient à la maison avec la jolie Marion. Le début d’une grande histoire d’amour entre cet ouvrier toujours prêt à lutter pour plus de justice sociale dans son usine et cette jeune femme moderne et émancipée.

La fiche du DVD / Blu-Ray

Le film : "Huit heures ne font pas un jour "
De : Rainer Werner Fassbinder
Avec : Gottfried John, Hanna Schygulla, Luise Ullrich, Werner Finck, Wolfgang Schenck
Sortie le : 25 avril 2018
Distribution : Carlotta Films
Durée : 472 minutes
Film classé : Tous publics
Nombre de DVD / Blu-Ray : 3
La série
Les bonus

Avant les séries qui aujourd’hui font florès, Fassbinder a aussi marqué le genre:  « Le Monde sur le fil », « Berlin Alexanderplatz », et « Huit heures ne font pas un jour » . Cette vision sociale et familiale d’une époque allemande tient tête à toutes les conventions des séries à succès.

Elle s’en démarque totalement. Cinq épisodes (90 mn chaque fois !) pour décrire le quotidien d’une famille de la classe ouvrière allemande. Où l’humour d’une mamie totalement barrée mais sympathique (Luise Ullrich) casse la rigidité ambiante et compassée des Krügger-Epp.

Seul le petit-fils Jochen, déjà très grand, échappe à la morosité. Il travaille en usine où l’ambiance n’est pas forcément joyeuse, mais la camaraderie aidant, il tient bon. Encore plus le jour où il fait la connaissance de la jolie Marion (Hanna Schygulla) qui très vite ne voit que par ce grand gaillard beau, fort et intelligent. C’est pourtant elle qui va vraiment lui ouvrir les yeux…

Jochen est l’archétype du personnage fassbindérien à qui l’on se référe pour comprendre l’Histoire là où le cinéaste nous la livre. Très bien joué par Gottfried John, il incarne chaque fois sa vision, qu’elle soit drôle, amoureuse, familiale ou sociale.

Un point sur lequel Fassbinder insiste particulièrement en relevant les conditions de travail éreintant de son usine.De la pénibilité des tâches à la prime au rendement, de l’amélioration de la machine-outil (Jochen trouvera l’idée) à l’espoir d’un meilleur avenir, le cinéaste prône la résistance.

« Se résigner c’est la pire des choses » reconnaît Jochen, une idée qu’il adapte aussi bien à son travail que la grand-mère en fait son bréviaire.

Obstinée, têtue, Luise Ullrich a toujours raison ou bien rarement tort. Ce personnage haut en couleur décide de tout avec malice et opportunité. Elle donne déjà à cette époque une certaine idée de la condition féminine revendiquée tout aussi clairement par Marion (Hanna Schygulla, déjà excellente).

« Il m’arrive de réfléchir, c’est grave ? » demande-t-elle fausse ingénue mais belle émancipée dans le marigot masculin où trône Harald (Kurt Raab). Le beau-frère de Jochen mène une vie de recluse à son épouse.

Il est violent, pingre et triste. L’autre visage d’une Allemagne que Fassbinder fustige à travers les comportements racistes de ses concitoyens par ailleurs reclus bien souvent dans leurs conforts petit bourgeois.

Une critique sociale liée à un divertissement populaire dans le cadre d’une série à la télévision allemande, Fassbinder n’avait donc peur de rien. Il offre avec empathie et humour une alternative passionnante au monde factice et illusoire habituellement représenté à la télévision, avec des hommes et de femmes bien éloignés du téléspectateur moyen…La vie quoi !

Ce film sort dans le cadre d’une rétrospective Fassbinder. Dont  » Les larmes amères de Petra Von Kant » 

LES SUPPLEMENTS

  •  « Huit heures ne font pas un jour » : une série qui fit parler dans les chaumières, un documentaire de Juliane Maria Lorenz (40 mn). Hanna Schygulla, Irm Hermann ou bien encore Wolfgang Schenck, des comédiens de l’aventure la racontent avec Günter Rohrbach, alors responsable du pôle fiction de la chaîne allemande WDR. C’est très éclairant,il faudrait tout raconter. Quelques extraits :

« J’étais introvertie à l’époque » se souvient Hanna Schygulla « Je parlais bas, dans la retenue. (…) Ce film parlait d’amour à travers le manque d’amour ».

Pour Irm Hermann, collègue de travail de Marion qui par la suite rejoindra elle aussi la famille « c’était une période de rejet de la normalité, la seconde guerre mondiale était dernière nous, et l’esprit de 1968 nous poussait à nous libérer du joug des conventions ».

Wolfgang Schenck, collègue de travail à l’usine, est plus circonspect à l’idée de cette série, qui plus est avec Fassbinder. « Je n’ai pas été convaincu tout de suite (…) et je pensais qu’on allait aller vers le réalisme, proche du documentaire, alors qu’il a préféré une certaine stylisation ».

On assiste aussi à un mini débat entre deux hommes que je n’ai pas identifiés. « Prétendre que cette série est de gauche, c’est se moquer de la gauche » dit l’un. « Je n’ai jamais prétendu ça, elle est politique ». Un peu plus loin un homme raconte qu’au moment du tournage, il pensait que « cette série allait faire bouger les choses, qu’elle pourrait transformer l’époque, les gens, les travailleurs ».

Avant les séries qui aujourd’hui font florès, Fassbinder a aussi marqué le genre:  « Le Monde sur le fil », « Berlin Alexanderplatz », et « Huit heures ne font pas un jour » . Cette vision sociale et familiale d’une époque allemande tient tête à toutes les conventions des séries à succès. Elle s'en démarque totalement. Cinq épisodes (90 mn chaque fois !) pour décrire le quotidien d’une famille de la classe ouvrière allemande. Où l’humour d’une mamie totalement barrée mais sympathique (Luise Ullrich) casse la rigidité ambiante et compassée des Krügger-Epp. Seul le petit-fils Jochen, déjà très grand, échappe à la morosité. Il travaille en usine…
La série
Les bonus

Première tentative sérieuse à la télévision allemande de combiner critique sociale et divertissement populaire, « Huit heures ne font pas un jour » aborde avec empathie et humour des problématiques clés telles que la question de la solidarité au travail, le problème des loyers élevés, le racisme latent ou le divorce… Cette vision sociale et familiale d’une époque allemande se démarque totalement de tout ce que l’on peut connaître. Cinq épisodes (90 mn chaque fois !) pour décrire le quotidien d’une famille de la classe ouvrière allemande. Où l’humour d’une mamie totalement barrée mais sympathique casse la rigidité ambiante et compassée des Krügger-Epp, où l’on ne se fait pas de cadeaux. Autour du couple phare de cette aventure Gottfried John et Hanna Schygulla, une quinzaine de personnages évoluent avec distinction, habitués de la sphère Fassbinder (Irm Hermann, Wolfgang Schenck, Hans Hirschmüller). Parmi les nouveaux venus à l’époque Luise Ullrich, l’inénarrable grand-mère, et Werner Finck dans le rôle de son compagnon. Formidables ! AVIS BONUS Des commentaires de personnalités ayant vécu au cœur de l'aventure, très éclairant,excellent documentaire

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