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« Careless Crime » de Shahram Mokri . Critique cinéma

Synopsis: Quatre individus se préparent à incendier un cinéma lors d'une projection d'un film particulièrement attendu : des militaires ont retrouvé un missile non explosé, symbole d'un passé révolu et d'un présent encore indécis. En 1978, l’incendie du Cinéma Rex à Abadan, en Iran, a fait 478 morts. Certains le considèrent comme l’élément déclencheur de la révolution iranienne.

La fiche du film

Le film : "Careless Crime"
De : Shahram Mokri
Avec : Babak Karimi, Razie Mansori
Sortie le : 03/11/2021
Distribution : Damned Distribution
Durée : 134 Minutes
Genre : Comédie dramatique
Type : Long-métrage
Le Film

Le cinéma demeure encore cette terre inconnue où après avoir traversé des zones familières avec ces films standards, la frontière vous attend.

Et c’est le choc, une révélation cinématographique du film dans le film qui va bien au-delà : le cinéma dans le cinéma. Celui déjà réalisé il y a 40 ans, associé à celui que Shahram Mokri nous propose de découvrir aujourd’hui : « Careless Crime ».

La mise en œuvre d’un attentat qui fera 478 morts, brûlés vifs lors d’une projection à Téhéran d’un film très attendu sur la découverte d’un missile non explosé. Selon certains historiens il sonne le début de la révolution iranienne.

Dans un premier temps, on assiste à sa préparation, de manière assez pragmatique.

C’est une journée ordinaire. Les spectateurs se présentent devant la salle de cinéma. Ils vont et viennent sur l’esplanade. Parmi eux quelques personnages particuliers, un couple en quête de billets, une jeune femme avec des affiches.

A la recherche d’un lieu pour les poser, Elham (Razie Mansori) est comme le guide de la place. Elle en devient presque amusante à force d’aller et venir, et de buter contre des murs.

Le directeur Mr Naderi lui indique enfin une porte « derrière laquelle tu pourras les bloquer ». Une issue de secours, s’étonne la jeune femme.

La remarque presque anodine révèle un sentiment de malaise qui va nourrir l’intrigue de mille tensions.

Elle prend sa source dans ce cinéma, s’égaie tout autour et rebondit sur l’écran pour le film sur lequel pèse des menaces d’attentat : des militaires pas très futes-futes s’interrogent sur la présence d’un missile en rase campagne, intacte.

Tout près, des jeunes filles préparent une projection en plein air. « Les Cerfs » dont la sortie  il y a quarante ans a été marquée par l’incendie volontaire d’une salle de cinéma. Des centaines de spectateurs ont péri.

« Que célébrez-vous donc ? » interroge le capitaine perturbé par le sujet qui du passé au présent relaie la puissance des images et leur contenu.

Sommes-nous toujours sous le règne du Shah ou bien déjà aux grandes heures d’une révolution populaire ?

Dans cet entrelacs de situations, le scénario subtil invite ainsi tous les personnages à vivre le plus naturellement cet instant d’éternité que le monde va découvrir dans son horreur, sa lâcheté, son absurdité.

Il est le fait de ces quatre hommes aperçus un instant près du cinéma, littéralement scotchés désormais à la caméra d’un réalisateur habile et manipulateur. On ne les lâche plus, aux aguets de leurs moindres faits et gestes préparatoires à l’incendie.

Shahram Mokri nous dit que le mode de l’intervention criminelle évitait la mort des civils. C’était sans compter sur une salle surchargée, des poignées absentes, des portes fermées, des issues sans … issue.

Après une première tentative avortée, le quatuor revient dés le lendemain pour perpétrer son forfait

Trois pyromanes y laisseront leur vie. Survivant, Takbali (Abolfazl Kahani) nous renvoie au début du film à son mal-être d’aujourd’hui , quatre ans plus tard, qu’il tente de soigner avec des cachets obtenus sous le manteau.

Hagard et déboussolé, l’Histoire pour lui s’est terminée. Mais pas le film qui tourne dans sa tête. Qui le hante. Quand le cinéma reprend la boucle sans fin de la même histoire. Celle d’un pays imaginaire peuplé de rêves et de mensonges. C’est bien du cinéma. Du grand cinéma.

Prix Bisato d'Oro .Meilleur scénario original à Venise Prix spécial du jury au Chicago International Film Festival. Le cinéma demeure encore cette terre inconnue où après avoir traversé des zones familières avec ces films standards, la frontière vous attend. Et c’est le choc, une révélation cinématographique du film dans le film qui va bien au-delà : le cinéma dans le cinéma. Celui déjà réalisé il y a 40 ans, associé à celui que Shahram Mokri nous propose de découvrir aujourd’hui : « Careless Crime ». La mise en œuvre d’un attentat qui fera 478 morts, brûlés vifs lors d’une projection à Téhéran…
Le Film

C’est un grand et beau film, complexe par la structure narrative retenue autour d’un fait divers dramatique survenu il y a quarante ans en Iran. Peu avant la chute du Shah des individus vont incendier une salle de cinéma – visée occidentale certaine - en faisant 478 victimes. Ce que raconte « Careless Crime » imaginé entre le passé de cet attentat et le présent de ces spectateurs iraniens qui s’apprêtent à voir un film dont ils vont devenir aussi les acteurs, malgré eux. La magie du cinéma. Sur l’écran en effet l’histoire raconte l’enquête de militaires iraniens autour d’un missile qui n’a pas explosé. Tout près des jeunes filles préparent une projection en plein air d’un film tourné il y a quarante ans et au cours duquel des centaines de personnes ont péri dans un incendie volontaire. « Que célébrez-vous donc ? » interroge le militaire perturbé par le sujet qui du passé au présent relaie la puissance des images et leur contenu. Sommes-nous toujours sous le règne du Shah ou bien déjà sur les prémices d’une révolution populaire ? C’est toute l’ambiguïté volontaire du propos qui tout en reconstituant un fait historique dramatique nous parle avant tout de cinéma. De ses zones encore inconnues, de sa grammaire à peine retenue. Shahram Mokri nous raconte formidablement bien une aventure fantastique.

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