Synopsis: A Paris, André Chatelin, un restaurateur au grand cœur, voit débarquer la fille de sa première épouse qu'il n'a pas vue depuis des années. La jeune femme se prénomme Catherine et déclare que depuis la mort de sa mère à Marseille elle n'a nulle part où aller. Bientôt, la jeune fille tente d'évincer Gérard, un sympathique étudiant sans le sou qu'André considère comme son fils. Ce n'est que le début de son projet machiavélique...
La fiche du DVD / Blu-Ray
Le film
Le bonus
«Elle vous tourmente gentiment » dit la gouvernante à son patron.
Les critiques de l’époque avaient la dent dure. Pour souligner et dénoncer la personnalité de l’héroïne, leur vocable ne manque pas de superlatifs. Monstre, garce, répugnante, la frêle Danièle Delorme, confortée par ses rôles de jeune première, reçoit alors une volée de bois vert à travers un personnage, Catherine, qu’elle assume magistralement.
Pour sortir de la misère, cette jeune fille va séduire un restaurateur célèbre du marché des Halles à Paris, qui n’est autre que le premier mari de sa mère. Les deux femmes ont imaginé un stratagème impitoyable pour déstabiliser la bonne entente et l’harmonie qui règne autour de Laurentin. Gérard son plus proche ami travaille la nuit au restaurant pour assurer le jour ses cours de médecine. « C’est comme un fils pour moi » raconte le cuistot à qui veut bien l’entendre.
Catherine veut bien l’entendre en racontant à l’un et à l’autre des contre-vérités qui enveniment peu à peu leurs relations. Le ver est dans le fruit et ne va cesser de ronger ses rancœurs et sa méchanceté. Malheureuse, plaintive, l’héroïne fait vraiment peine à voir, forçant la pitié et la compassion apparente dans les recoins les plus noirs de sa séduction manipulatrice.
Laurentin ne voit rien, il est amoureux. D’autres femmes lui posent assez de problèmes par ailleurs, dont sa mère, dure et autoritaire, derrière le tiroir-caisse de sa guinguette des bords de Marne. On retrouve le décor de « La Belle équipe » mais cette fois planté dans le noir et le désespoir.
Julien Duvivier serait-il un brin misogyne ? Sa mère, sa maîtresse, son ex-femme et même sa gouvernante qui cancane et écoute aux portes, toutes les femmes à ses yeux sont manipulatrices, perfides, possessives ou folles. Mais le Gabin de la farce a du répondant pour une armée de bourdons. Il est dans sa période acteur, au mieux de son jeu, face à Gérard Blain qui en prend de la jolie graine. Truffaut le remarquera, il ne sera pas le seul !
LE SUPPLEMENT
- Autour du film (18.25 mn). Si Julien Duvivier a souvent été considéré comme un cinéaste de la noirceur intégrale, Voici le temps des assassins intervient à une période sombre pour le réalisateur. Son précédent film « Marianne de ma jeunesse » a été un échec et son épouse vient de mourir.
« Il livre alors le film le plus noir, le plus dur, et le plus amoral de toute sa filmographie » assurent Eric Bonnefille (« Julien Duvivier, le mal aimant du cinéma français ») et Hubert Niogret (« Julien Duvivier, 50 ans de cinéma ») les principaux intervenants.
C’est aussi le film des grandes retrouvailles entre Duvivier et Jean Gabin « précis et d’une justesse totale ». Près de 20 ans après l’époque de leur grande collaboration, ils renouent sur ce projet qui sera le dernier. Et peut-être l’un des tout premiers encensés par la Nouvelle Vague qui jusque-là ne portait pas Duvivier dans son cœur.
François Truffaut écrit que ce film lui paraît être « le meilleur (des films de Duvivier), celui dans lequel on peut sentir sur tous les éléments : scénario, mise en scène, jeu, photo, musique, etc…, un contrôle qui est celui d’un cinéaste parvenu à une totale sûreté de lui-même, et de son métier. »
Le futur réalisateur souligne particulièrement l’interprétation de Gérard Blain qui lui écrit alors une lettre de remerciement. Les deux hommes vont se rencontrer, en compagnie de Bernadette Lafont la compagne de Blain. En 1957 François Truffaut tourne l’un de ses premiers court-métrage « Les Mistons » avec ses nouveaux amis…
- Mais aussi. Après leurs ressorties en salles en Avril dernier, les trois œuvres emblématiques de Julien Duvivier, « La Belle Equipe », « La Fin du Jour » et « Voici le temps des assassins » sortent en DVD et Blu-ray restaurés. Egalement au programme :
« Tartarin de Tarascon », comédie jubilatoire de Raymond Bernard orchestrée par Marcel Pagnol et interprétée par Raimu, ainsi que le chef-d’œuvre de Maurice Tourneur, « Justin de Marseille », film de gangsters marseillais…
Le film
Le bonus
Comme Jean Gabin abandonne son rôle de séducteur coutumier, il doit jouer et il le fait très bien dans une composition inhabituelle. Ce restaurateur fort réputé s’amourache d’une jeunesse qui débarque un beau matin dans son repère au beau milieu des Halles de Paris (super décor). Mais la belle n’y est pas arrivée par hasard.
Elle va semer la zizanie, jeter le discrédit sur les uns et les autres, pour apaiser une sourde rancœur et sortir de la misère dans laquelle elle et sa mère sont plongées. Deux diaboliques qui entraînent le spectateur dans un ténébreux tourbillon de mensonges et d'ignominie grâce à une intrigue noire et rocambolesque.
Danièle Delorme qui abandonne ici ses compositions de jeune première est absolument magistrale en jeune garce prête à tout. C’est aussi la révélation d’un jeune talent Gérard Blain et la confirmation d’un grand cinéaste qui n’aura jamais été aussi noir et profond dans la peinture d’une société.
Avis bonus
Un éclairage intéressant sur le film et son histoire
5 Commentaires
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