Synopsis: Après un nouveau vol à l’étalage, Osamu et son fils recueillent une petite fille livrée à elle-même. Réticente à l’idée d’abriter l’enfant, la femme d’Osamu accepte lorsqu‘elle comprend que ses parents la maltraitent. En dépit de leur pauvreté, survivant de petites rapines qui complètent leurs maigres salaires, les membres de cette famille vivent heureux …
La fiche du film
Le film
Les bonus
Chez Kore-eda, les histoires de familles n’en finissent pas. Mais l’angélisme de « Notre petite sœur » n’est plus de mise. Ni la douceur séraphine de « Nobody knows » où les gamins livrés à eux-mêmes se débrouillent au petit bonheur la chance.
La famille d’Osamu fait de même.
La carrée n’est pas grande et le peu de pièces s’accoutume à ces locataires qui se poussent pour accueillir Juri. Récupérée dans la rue, elle passera une nuit prévient l’épouse qui devant son petit corps abîmé refrène ses ardeurs.
Juri est adoptée.
L’amour fait le reste. Chez les Shibata on sourit beaucoup, on aime tout autant. Avant que chacun ne vaque à ses occupations. Un va et vient orchestré sous l’œil attendrissant de la grand-mère (Kiki Kirin) qui chérit avant tout Aki sa petite fille grande d’une vingtaine d’années. Mayu Matsuoka, craquante il est vrai.
Elle fait l’amour pour des hommes qui ne peuvent la toucher. Le commerce est particulier mais personne ne le conteste. Aki ramène beaucoup d’argent, quand le père et le fils peinent à rapiner dans les épiceries ou les voitures.
Une activité à laquelle Juri se joint naturellement, malgré les appréhensions du chef de famille. Se faire prendre c’est révéler un délit, voire un trafic, pire, un enlèvement.
Osamu n’est plus tranquille. Aurait-il d’autres secrets à taire ? La fratrie exemplaire l’est déjà un peu moins, mais ce n’est pas encore patent pour le réalisateur bienheureux au milieu de ces gens, simples, et très aimants.
C’est tout son cinéma qui nous entraîne dans le sillage d’une vie à raconter, de la spéculation immobilière à la nourriture chiche et pas toujours très bonne. Des déboires professionnels de la mère, en mode licenciement, et de l’accident du travail du père qui ne sera pas indemnisé.
Et je vous dis qu’ils sont pourtant heureux, encore un peu heureux… Kore-eda ne les abandonne jamais dans le déni et le délit qui les confrontent au monde qu’ils fuyaient.
« On n’est pas des gens normaux » dit le père. Lily Franky est super ! Son fils ne l’appelle jamais papa. La grand-mère oublie la rebuffade, cette grand-mère magnifique, au sourire trop avenant, royale Kiki Kirin qui ne goûtera plus « aux délices de Tokyo ».
Kore-eda lui a peut-être confié l’un de ses plus beaux rôles, son dernier avec lequel le cinéaste signe un réquisitoire sans appel à l’encontre de la société japonaise. …
LES SUPPLEMENTS
- Extrait de l’émission « Story movies » ( 4.40 mn ). « La famille ça m’intéresse, ça évolue toujours »
« Au moment de « Still walking », j’ai perdu ma mère, je faisais alors des films du point de vue des enfants , et puis mon regard s’est déporté. (… ) Mes films sont le reflet des soubresauts de ma vie .(… ) Je ne ressasse pas le même thème, pas l’impression, mais je m’interroge sans cesse sur le sens de la famille ».
« Comme le petit garçon du film, je dormais dans un placard, son regard sur la famille c’est le mien, mais ce n’est pas une autofiction, j’y ai seulement mis des éléments très intimes de ma vie ».
- Avec Ciné+ ( 2 mn ). « Après –Tel père, tel fils– J’avais envie de tordre l’ordre moral et de bouleverser l’idée que l’on se fait de la famille traditionnelle , que le spectateur s’attache à des personnages pas recommandables ».
« Le fil conducteur du film, c’est le désenchantement du fils par rapport à sa père ; il n’est pas le héros qu’il imaginait, et c’est commun à beaucoup d’hommes et ce sentiment amer parcourt le film ».
- Galerie de photos du tournage ( 01 mn ). Sympathique
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Hirokazu Kore-eda dans ce blog : « Notre petite soeur » – « Nobody knows » – « Après la tempête » – « Tel père, tel fils » – « Still walking » – « The third murder «
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Le film
Les bonus
En parlant à plusieurs reprises de la famille japonaise, Kore-eda l’ausculte sous différents angles et cette fois son analyse est quasiment sans appel. La société nippone, son fondement social et familial est profondément atteint.
Nous voici dans une tribu que l’on imagine recomposée, de manière très particulière. La petite dernière a été récupérée dans la rue.
La fratrie vit chichement des rapines du papa et de l’argent que ramène la maman de l’usine et sa fille, hôtesse dans une maison close. Au milieu, la grand-mère à l’air paisible, donne parfois de l’argent dont on ne connait pas la provenance et puis simule une vie solitaire pour éloigner la municipalité et ses projets immobiliers.
On va comprendre que cette fratrie a non seulement recollé des morceaux, mais qu’elle en a égaré beaucoup d’autres et qu’elle ne peut plus maintenant maintenir l’embarcation à flots.
Tout le talent de Kore-eda est de nous embarquer à notre tour avec cette famille qui parait heureuse envers et malgré tout. Malgré les soucis quotidiens, les déboires professionnels ...
Une interprétation sans faille. Un grand film qui mérite (avec d’autres) sa palme d’or.
AVIS BONUS
Je suis moins convaincu par la faiblesse des deux petites interviews du réalisateur, récupérées sur des émissions TV.
Que dire de plus que monsieur Loïck . Shoplifters est un beau film dont le fil conducteur est l’amour dans cette famille recréée en parallèle de la bienséance traditionnelle.
Tous craquants à leur façon, jamais un mot plus haut que l’autre ,par contre des mots réconfortants et tendres.
Et malgré la survie à 6 dans une bicoque, l’humour est présent.
« Tant que les magasins ne font pas faillite », on peut prendre des petites choses ,ha,ha, mais avec une prière avant le larcin!
Courrez voir ce chouette film!!!!
PS: Quel plaisir de retrouver Kiki Kirin, avec son air coquin
Rien à ajouter car il ne faut pas trop en dire (juste qu’il y a beaucoup d’amour et un jeu d’acteurs exceptionnel) mais c’est véritablement un excellent film et il n’est pas étonnant qu’il ne plaise pas aux dirigeants japonais. Palme d’or amplement méritée.