Synopsis: Une terrasse qui domine La Havane, le soleil se couche. Cinq amis sont réunis pour fêter le retour d'Amadeo après 16 ans d'exil. Du crépuscule à l'aube, ils évoquent leur jeunesse, la bande qu'ils formaient alors, les 400 coups qu'ils ont vécus à l'époque et la foi dans l'avenir qui les animait...
La fiche du DVD / Blu-Ray
Le film
Les bonus
Au profit d’une actualité qui voit le rapprochement entre Cuba et les USA, ce « Retour à Ithaque » parait presque prophétique. Il évoque une petite fête entre cinq amis de toujours à l’occasion du passage d’Amedeo, exilé pendant quinze ans en Espagne. Tout le monde est content de ses retrouvailles, mais bien évidemment, au fil des heures, le ton varie de l’amitié à l’inquiétude, des doutes aux questionnements.
On se demande encore comment cet écrivain célèbre a pu laisser femme et enfants au pays à l’occasion d’une tournée européenne. Amedeo est sous le coup d’un interrogatoire en règle qu’il esquive comme il peut, à peine contredit par la caméra de Laurent Cantet que je n’imaginais pas aussi attentive.
Je n’ai pas aimé « Entre les murs » et « Foxfire » manquait à mon avis d’ambition.
C’est un peu la fièvre des « Ressources humaines » que l’on retrouve dans cet entrecroisement de personnages qui sont autant de situations particulières, dans un contexte social et politique bien particulier. Ce que ne semble pas comprendre l’écrivain mis en accusation par des gens qui sont restés au pays, envers et malgré tout. Autour des reproches sur son départ, il doit expliquer un pan de sa vie qui s’effrite, « dans un pays où il faut dire et penser ce que l’on te dit ».
Imperceptiblement, le réalisateur secondé par les romans de Leonardo Padura dont il s’est inspiré, donne ainsi à sa mise en scène une connotation très politique sur l’Histoire du pays, et les perspectives qui aujourd’hui s’en dégagent. Il y a là un peintre déchu, sans trop comprendre pourquoi. Un ingénieur qui gagne mieux sa vie en mettant la main dans le cambouis. Une doctoresse sans avenir qui fait « la pute » dit-elle en espérant que ses enfants à Miami lui envoient un peu d’argent, et un petit dirigeant magouilleur…
Un panorama de la société cubaine d’hier et d’aujourd’hui, une population qui a cru à la révolution et qui aujourd’hui est confrontée à ses avatars. L’opportuniste de service doit aussi rendre des comptes sur sa soumission au parti, ce dont il s’acquitte sans mea-culpa, ni autocritique mais en assumant sa fuite en avant. « Ils ont fait de moi une merde, ils ont volé mon rêve, mais pas ma vie. (… ) S’ils ont volé la vôtre c’est que vous vous êtes laissé faire ».
Entre mauvais rhum et whisky de contrebande, les discussions tournent au règlement de comptes, mais l’amitié se charge toujours de replacer les pions dans les bonnes cases . Certains se sont salis les mains, d’autres sont devenus des rouages du système. Et puis les cœurs purs ou brisés demeurent dans l’expectative de jours meilleurs. Les mêmes, irrités par la décision de leur ami de ne plus quitter l’île qui l’a vu naître. Naïf, cynique ou gardien d’un secret qu’il n’a jamais pu révéler, c’est tout l’enjeu de son retour au pays. Un mal dont on ne guérit jamais…
LES SUPPLEMENTS
- Rencontre avec Laurent Cantet . « Je n’ai pas voulu tirer de grande conclusion sur le pays, mais ma rencontre avec Leonardo Padura, et ses romans que je connaissais ont été déterminants. »
Une affinité, un grand respect mutuel, « c’est lui qui a amené la matière concrète. (… ) Plus on entre dans la société cubaine, plus on se rend compte de sa complexité, étonnante et intéressante à comprendre. (.. ) On parle ici d’une génération qui a cru à la révolution à un âge auquel elle pouvait accéder à des responsabilités. Mais à la chute du mur de Berlin, l’Urss arrête d’aider Cuba, tous ces gens ont eu le sentiment de ne plus avoir d’espace pour exister, ce fut ce qu’ils appellent « la période spéciale ».
- Rencontre avec Leonardo Padura. L’écrivain raconte la manière dont il a travaillé avec Laurent Cantet à partir de ses propres écris. Il a ainsi fallu reprendre les personnages de ses romans.
« On a alors plus imaginé leur rapport dans la société avec laquelle ils ont vécu, et à cause de laquelle ils ont souffert. On tenait à raconter la frustration d’une génération, c’est aussi ma responsabilité d’écrivain que d’avoir ce regard ».
« Il est plutôt rare que des Cubains reviennent de leur exil » confesse-t-il, « mais le cas d’Amedeo pour le scénario représentait un détonateur puissant, il mettait les autres personnages dans une position inhabituelle. ( … ) La décision de quitter le pays et de revenir s’y installer provoquent toujours des dissensions au sein du groupe, car il quitte le pays à un moment critique, la période spéciale et y revient alors que les choses se sont plutôt améliorées. (… ) En écrivant le scénario on s’est rendu compte qu’il fallait aussi parler de la réalité cubaine, à travers le regard du fils d’Aldo et de sa copine qui ont une vision bien différente de leurs aînés, plus hérétique, ils ne croient pas à l’épanouissent à Cuba, ils leur faut partir ».
Review Overview
Le film
Les bonus
Laurent Cantet n’a pas choisi le chemin le plus simple pour se rendre à La Havane et tenter de dresser un panorama politique et social d’un pays qui s’ouvre un peu plus chaque jour au monde nouveau. Il choisit les mots de l’écrivain du pays Leonardo Padura avec qui il signe le scénario pour mettre en scène cinq vieux copains de toujours qui à l’occasion du retour de l’un d’entre eux d’Espagne se réunissent autour d’une bonne table et de bonnes bouteilles. Ce sont leurs conversations que le réalisateur enregistre avec une clairvoyance parfaite pour ne jamais lasser le spectateur qui va de l’un à l’autre en découvrant ce que fut le pays et les perspectives qui se dressent aujourd’hui devant lui.
Ce qui revient dans ces souvenirs c’est un pays, sans électricité où les gens se jetaient à la mer pour fuir la dictature. Deux décennies plus tard, les choses auraient-elles changé ? La réponse se trouve peut-être dans le secret du retour d’Amadeo …
Avis bonus
Rencontres avec le romancier et le réalisateur, ça marche !
6 Commentaires
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