Synopsis: Angleterre, fin du XVIIIème siècle : Susan Vernon jeune veuve belle et séduisante, fait frémir la haute société. Sa réputation et sa situation financière se dégradant, elle se met en quête de riches époux, pour elle et sa fille. Épaulée par son amie Alicia, une Américaine en exil, elle déploie des trésors d'ingéniosité et de duplicité, ménageant deux prétendants : le charmant Reginald et Sir James Martin, un aristocrate fortuné et stupide...
La fiche du DVD / Blu-Ray
Le film
Les bonus
Meilleur dvd Novembre 2016 ( 2 ème )
Il y a Jane Austen, sa vision mordante de la société, teintée d’humour et d’ironie, un réalisateur, Whit Stillman, tout imprégné d’un discours malicieux qu’il traduit dans la fausse élégance d’une mise en scène amusée, et des personnages habillés par des comédiens qui ne déméritent jamais.
Pas une faiblesse, pas un ton déplacé, rien que de l’habileté et de la passion incarnées à merveille par l’héroïne de cette aventure, Kate Beckinsale, une Lady Susan parfaite.
Et chaque fois que je voyais apparaître Sir James Martin, idiot huppé, fat et stupide, en un quart de seconde, j’avais tous les bonheurs du monde. Tom Bennett lui donne une prestance indécente, un bonheur usurpé, la bêtise incarnée. Il pense pouvoir aimer la fille de Lady Susan (Morfydd Clark) ou Lady Susan elle-même, qu’importe, Martin papillonne sottement.
Le contraire du second prétendant, Reginald DeCourcy (Xavier Samuel) un jeune homme bien mis de sa personne et loin d’être benêt. Un brin agaçant, certes, à force de vouloir tout comprendre, tout expliquer, surtout pour sa promise à qui il demande sans cesse de justifier ses actes.
Mais la belle est tellement intrigante, surprenante, inattendue, qu’il est bien difficile de lui accorder quelques vérités.
Lady Susan complote, trame et manigance, joue sur plusieurs tableaux, un tourbillon de faux semblants et de jeu de dupes, magnifiquement écrits et tout aussi bien orchestrés. « Ma fille s’est révélée rusée et manipulatrice » dit-elle à Alicia ( Chloë Sevigny ), sa confidente et complice. Mais qui de la mère ou de la fille intrigue le plus ?
Opportuniste et cynique, Lady Susan a l’avantage de l’expérience, et le charme et l’élégance des belles à qui tout semble permis. Elle souhaite ainsi la mort du mari d’Alicia, parce que celui-ci l’a mise en garde contre ses agissements. Ce qui parait bien raisonnable, mais là encore les beaux mots et les grands discours priment sur la raison.
J’ai oublié de préciser que Lady Susan se démenait ainsi à la suite d’un veuvage à la fleur de l’âge. Il lui faut trouver compagnons pour elle et pour sa fille. Un patrimoine qui s’amenuise, des finances en peau de chagrin et des amitiés de plus en plus distantes, l’héroïne se devait de reconquérir le monde.
La plume de Jane Austen, la caméra de Whit Stillman, s’y emploient avec panache.
LES SUPPLEMENTS
- Rencontre avec le réalisateur Whit Stillman. Il se dit admiratif de la pureté du style de Jane Austen, « quelque chose de classique, d’éternel et qui demeure pertinent à notre époque. (…) C’est assez proche des pièces d’Oscar Wilde, très drôle, et tout de suite j’ai pensé à Kate Beckinsale, mais elle était encore trop jeune quand j’ai commencé à travailler sur ce projet. Elle avait 20 ans … »
Le plus dur à ses yeux fut de « transformer la structure épistolaire en dramaturgie classique, avec le risque de mettre la narration de côté ».
- Entretien avec Sophie Demir, l’auteur de « Jane Austen, une politique du différend ». « L’ironie chez Jane Austen c’est plus une façon de laisser le lecteur choisir » dit-elle en évoquant la position du neutre qui fait écho au discours de Roland Barthe. « Les jugements on ne sait pas à qui les attribuer (…) sur un sujet aussi bateau elle reste plus sur l’écriture que dans le thème ».
L’héroïne est très cynique mais « elle représente une réalité de l’époque. Si on veut appréhender Jane Austen à travers les adaptations cinématographiques, cette vision sera erronée, il y manque certains caractères, comme l’ironie, qui par contre est très présente avec ce film, ne serait-ce qu’à travers la présentation chaque fois des personnages de manière très particulière, dans le genre commedia dell’arte où il y a une distance par rapport au personnage ».
- Making of (9.13 mn). Autour de quelques petites scènes de tournage, les comédiens s’expriment sur l’adaptation et les personnages du film. Ça n’a rien de convenu, on apprend encore sur la personnalité des uns et des autres. Le tournage (5 semaines et 1 jour) a été une bonne partie de plaisir comme semble le montrer le dernier jour. Wonderful !
Le film
Les bonus
Voici une adaptation quasiment parfaitement d’une œuvre de Jane Austen dont la finesse d’écriture, et sa fausse préciosité au mordant redoutable font écho à une mise en scène qui elle aussi se joue des apparences et des turpitudes d’une héroïne bien dangereuse.
Les rapports entre les gens sont absolument délicieux pour demeurer dans le ton d’une comédie de salon, souvent, mais aussi beaucoup de mœurs vis-à-vis d’une société faux culs, dont le contexte de la bienséance est tellement acéré que la drôlerie en devient irrésistible.
Avec Sir James Martin (génial Tom Bennett), on atteint des sommets de préciosités ridicules, imaginant correspondre au profil de cette famille qu’il entend rejoindre en épousant la jeune fille qui elle attend beaucoup plus de son cousin.
Une situation posée par les besoins pécuniaires d’une mère qui désormais veuve doit retrouver très vite un compagnon pour elle et sa fille adolescente. Kate Beckinsale et Morfydd Clark constituent une excellente paire.
Avis bonus
Où l’on parle encore beaucoup de Jane Austen, avec en prime un making of qui n’en fait pas trop, mais demeure bien plaisant.
Un commentaire
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