- Durée : 1 heure et 33 minutes
- Dvd : 21 mai 2024
- Cinéma : 20 décembre 2023
- Acteurs : Sam Spruell, Mark Stanley, Marcelo Alonso, Alfredo Castro, Mariano Llinás
- Sous-titres : Français
- Langue : Espagnol
- Studio : Blaq Out
L’histoire : Terre de Feu, République du Chili, 1901. Un territoire immense, fertile, que l’aristocratie blanche cherche à « civiliser ». Trois cavaliers sont engagés par un riche propriétaire terrien, José Menendez, pour déposséder les populations autochtones de leurs terres et ouvrir une route vers l’Atlantique. Sous les ordres du lieutenant MacLennan, un soldat britannique, et d’un mercenaire américain, le jeune métis chilien, Segundo, découvre le prix de la construction d’une jeune nation, celui du sang et du mensonge.
Si les étoiles n’apparaissent pas, reportez-vous à la fin de l’article
La colonisation de l’Amérique du Sud, comme toutes interventions expansionnistes, a entraîné le massacre d’un grand nombre d’autochtones. Les Indiens Selknam, dont l’extermination systématique demeure encore aujourd’hui une grande inconnue au pays d’Allende et de Victor Jara.
Je ne sais trop pourquoi, mais en suivant le périple de ces trois hommes chargés de tracer une route pour un gros éleveur de moutons, leurs luttes me reviennent à l’esprit. Felipe Galvez, le réalisateur n’y fait aucune allusion, mais son style scénographique, sa prégnance historique posent les bases d’un récit profondément enraciné sur cette Terre de Feu, où le Chili va voir le jour.
Le trio est disparate (photo): un ancien militaire britannique, un mercenaire américain, à la solde d’un gros propriétaire terrien où travaille, tel un esclave, Segundo, un jeune métis désigné pour les accompagner.
C’est un peu l’énigme de ce film, à son image, crépusculaire. Il parle peu, exécute les ordres à minima, comme interdit par l’avenir qui se profile dans son regard. Ca ressemble à la liberté, mais au prix de sacrifices moraux et d’une conscience malmenée.
Segundo réfrène sa haine, sa colère envers ses compagnons et leurs pratiques barbares.
Peut-il trahir les siens pour goûter à l’indépendance qui lui tend les bras ? La réponse lui viendra d’un fonctionnaire de la capitale, Vicuna, en mission sur la Terre de Feu pour le gouvernement.
Don José, le maître des lieux l’écoute à peine, souverain de droit sur le peuple indien et leur territoire. « Les politiciens ne connaissent pas notre pays » dit-il à ce nationaliste de la première heure qui voit en Segundo la providence de sa mission.
Lui et sa compagne Kiepja, arrachée à l’emprise d’un colonel britannique défroqué, figurent sur le petit film de propagande réalisé à l’intention du centenaire de la naissance du pays. Segundo se plie à toutes les exigences du scénario imaginé par Vicuna.(photo). Kiepja est plus réticente, surtout quand il est question de boire du thé. L’indienne ne peut pas tout renier !
LES SUPPLEMENTS
- Entretien avec Felipe Galvez et Antonia Girardi ( 27 mn ) » Un film qui génère plus de questions que de réponses » reconnait le réalisateur. » Je ne fais pas un travail documentaire, pour dire comment ça s’est réellement passé, mais je préfère montrer et souligner, qu’on regarde un film »
« J’adopte le point de vue qui m’est le plus proche, moi-même petit fils de métis chilien, j’ai été Segundo, puis Mac Lennan »
Antonia Girardi : « on ne pouvait pas raconter toute l’Histoire du Chili, alors on retient le point de vue des colonisateurs , rentrer dans leur tête , creuser leur mentalité… »
Un long processus, en raison du financement , des recherches …
L’idée des chapitres ? Tourner en Terre de feu ? « La famille Menendez nous le refusait , tu réalises que toute cette terre est encore privée , on a tourné dans les rares lieux publiques , il faisait très froid, les chevaux n’avançaient pas ... »
Un premier film
« Ce film court au désastre, le réalisateur ne sait pas ce qu’il doit faire » rigole aujourd’hui Felipe Galvez alors que sur le plateau il demandait des conseils aux techniciens qui l’entouraient…
Pourquoi la couleur doit-elle être particulière ?
Le film
Le bonus
Il est question à la fois de la naissance d’un pays et de la mort d’une civilisation. Celle du peuple Selknam, des indiens qui pour entraver la bonne marche de l’Histoire chilienne vont être exterminés au fil des années piétinées par quelques gros propriétaires terriens.
En 1901, le gouvernement chilien décide de mettre fin à leur hégémonie, et de pacifier cette « terre de feu » sur laquelle un jeune métis et sa compagne vont montrer la voie du renouveau.
Il y aura encore beaucoup de massacres et d’exactions sur leur chemin mais la ligne de conduite du jeune réalisateur est exemplaire pour ne pas donner à la barbarie l’image convenue des récits horrifiques. Sa mise en scène va même jusqu’à la retenue pour laisser au paradoxe des paysages de western, le soin de bien poser les faits …sur un fait historique méconnu.
Les hommes vont jouer à qui sont les plus forts, les plus riches, les plus dominateurs. Un couple de jeunes métis va paisiblement les écarter de leur chemin, pour en tracer un plus conforme à leurs aspirations. Telle une réappropriation, une justice réparée, au prix du sang, et de la douleur à jamais plaquée sur leurs visages.
AVIS BONUS
Un entretien éclairant avec le réalisateur et la co-scénariste