Synopsis: Un jeune homme qui habite dans un froid village au sud de l'Amérique du Sud, décide de partir à la recherche de son père. Lors de son périple, il découvrira des faits inattendus sur ses origines sud-américaines...
La fiche du DVD
Le film
Le bonus
Ultime devoir de vacances, cet extrait du coffret Solonas. Merveilleux!
Quand je pense cinéma, je pense Fellini, sa flamboyance, sa vision du monde éclaté dans un imaginaire très réel. C’est le maître auquel d’autres cinéastes ont pu s’identifier. Kusturica, Jodorowsky, Roy Anderson…Au cours de ce sublime voyage imaginé par Solonas, les noms de ces réalisateurs me sont revenus plusieurs fois. Comme autant de balises d’un cinéma vraiment novateur.
Solonas nous raconte une histoire très simple, revue et corrigée mille fois : la quête du père par un enfant déboussolé. Mais la manière dont le réalisateur argentin nous conte cette légende, au cœur du continent latino-américain chamboulé, prend une dimension exceptionnelle et mirifique. Métaphorique, poétique, politique, son film est un grand voyage dans le temps et l’Histoire d’un monde qu’il rend aussi attachant que désespéré, aussi loufoque qu’inespéré.
C’est un pays où tout s’écroule, nous dit-il comme dans ce collège qui laisse passer les courants d’air et la neige en rafale. Les cadres des dirigeants tombent les uns après les autres, et le surveillant a bien du mal à contenir ses ouailles, ses cafards comme il les appelle à moins qu’il ne s’agisse des petites bêtes qui se faufilent un peu partout.
L’établissement scolaire, qui ressemble à une prison, est filmé comme une prison. Martin ( Walter Quiroz ) souhaite s’en échapper pour s’éloigner d’un milieu familial qui ne lui appartient plus. Le remariage de sa mère est à ses yeux un désastre. Il veut retrouver son père, ce héros mythique, lui-même créateur de héros de bandes dessinées, qui vont le guider au fil de son périple. Une idée de génie.
Les îles tanguent en fonction de la météo, et le présentateur à la TV vire tribord de la même manière. Un vent de folie pour contrer le désespoir rampant. Un vent porteur d’images hallucinées quand aux portes de Buenos Aires toutes les villes et les villages sont sous les eaux. Solanas rivalise d’audace et de ténacité pour offrir un panorama cinématographique rarement égalé. Les gens demeurent dans leur demeure, se déplacent en barque pour ramener au cimetière un cercueil flottant. Dans la capitale, le personnel municipal ramasse les excréments à la pelle, dans des petits sacs en plastique. Le cinéaste dit n’avoir rien inventé.
Mais il sublime ce fatalisme ambiant et ridiculise les puissants incarnés par un président fantoche qui se déplace avec des palmes. On l’appelle La Grenouille. On le retrouve à plusieurs reprises dans des cérémonies improbables, toujours aussi impopulaire,aussi imperturbable. On sait alors ce que veut dire se serrer la ceinture (encore une superbe idée), avant de croiser le Camion de la dette extérieure et assister à une réunion de l’Organisation des pays agenouillés.
Des résonnances politiques et sociales à cette poésie surréaliste, Martin se promène dans un monde qui n’existe plus, un continent à l’abandon que les images de son père vont peut-être sauver. La grâce d’une plume, la magnificence des couleurs : un chauffeur de camion zigzague sur la route. La liberté n’est pas vaine. C’est tout l’espoir que porte ce film. Brillantissime.
- Rencontre avec Fernando Solanas (11.30 mn). « Je rêvais d’un film très latino-américain » dit-il. La recherche d’un projet pour l’Amérique latine ? « C’est une lecture possible, avec ses références et métaphores historiques. (…) On fait un film quand on le sent, j’ai écrit 17 projets de fiction, je n’en ai réalisé que 5 ».
Référence burlesque, caricature politique, voyage initiatique, il est d’accord avec tout ça, « mais pas à la Russe » se défend-il en saluant quand même le travail d’un Tarkovski avec « L’enfance d’Ivan », « mais c’est du réalisme politique sérieux, orthodoxe, moi j’aime rire de la politique, me moquer de la société ou des traditions ».
L’inondation de Buenos Aire ? « Ma grande satisfaction d’avoir pu rendre esthétiquement une grande part de l’âme ou du sentiment national, grotesque et pathétique, c’était l’époque de Menem, on ouvrait le journal on se disait ce n’est pas possible ».
Le coffret Fernando Solanas
À la fois cinéaste et homme politique argentin de premier plan, les activités artistiques et politiques de Fernando « Pino » Solanas sont intimement liées. C’est le sens de ce coffret qui renferme l’intégrale de ces films
- Deux poèmes épiques : « L’heure des brasiers » (1968 – 260 min). « Les fils de Fierro » (1972 – 134 min)
- La crise argentine :« Mémoire d’un saccage » (2004 – 120 min) . « La dignité du peuple » (2005 – 120 min)
- Le tango, miroir de l’Argentine : « Tangos, l’exil de Gardel » (1985 – 119 min) – Grand Prix Spécial du Jury à la Mostra de Venise. « Le Sud » (1988 – 127 min) – Prix de la mise en scène au Festival de Cannes
- Deux voyages politiques et poétiques ; « Le voyage » (1992 – 142 min). « Le nuage » (1998 – 123 min)
- Des suppléments. Un entretien avec Fernando « Pino » Solanas (03h00). Un entretien exclusif avec le Général Perón (1968 – 8 min). Un entretien avec Miguel Benasayag, philosophe (33 min)
- Les autres devoirs de vacances
« Henri Verneuil, un grand classique », « L’intégrale de Fernando Solanas », « M, le maudit » de Fritz Lang , « L’âge atomique » d’Héléna Klotz, Les films noirs de la Columbia
Review Overview
Le film
Le bonus
C’est un pan de l’Histoire latino-américaine que le cinéaste argentin édifie de manière subliminale à travers la quête paternelle d’un jeune garçon, qui va franchir plusieurs frontières pour arriver à ses fins.
L’occasion de découvrir de manière métaphorique, politique et poétique la situation d’un continent abandonné à des présidents fantoches que Solanas ne se prive pas de ridiculiser de manière grotesque. Et c’est très drôle. Plusieurs séquences sont édifiantes, superbes et à jamais gravées dans le marbre du 7 ème art. Buenos Aires sous les eaux devient derrière sa caméra le théâtre d’un opéra bouffe entamé dans un établissement scolaire ouvert à tous les vents. Il faut le voir pour le croire, ça dure 2 h 30 et ça passe comme une comète.
Avis bonus
Première rencontre, assez courte avec le cinéaste, qui revient avec pertinence sur son film
3 Commentaires
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