Synopsis: En plein Maccarthysme, Alfred Miller, auteur de renom demande à son ami d'enfance, Howard, plongeur dans un restaurant, de lui servir de prête-nom. Howard accepte et signe un feuilleton de télévision qui obtient un vif succès. Le héros du feuilleton, Hecky, est bientôt inquiété par la Commission qui lui demande de réunir des informations sur Howard.
La fiche du DVD / Blu-Ray
Le film
Le bonus
Il pourrait avoir écrit les dialogues qui lui ressemblent, mais non, Woody Allen se contente de les dire. Bien, très bien .Et le film lui ressemble aussi, tout en finesse et courtoisie, malgré un sujet peu enclin aux politesses : la chasse aux artistes communistes dans les années cinquante aux Etats-Unis.
Martin Ritt et le scénariste Bernstein ont été parmi les suspects couchés sur la liste noire de l’équipe du sénateur McCarthy. Ils savent de quoi ils parlent. Plusieurs comédiens sont également concernés dans cette aventure qui n’a rien d’une revanche (le film a été tourné vingt ans après les faits) ou d’un pamphlet. Le ton est plutôt celui d’une comédie qui permet d’en dire plus sur ce système d’inquisition, pernicieux : on n’interdisait pas aux artistes de se produire, mais on recommandait à leurs employeurs de les écarter.
Tous les prétextes sont «bons » et fallacieux pour détruire la carrière d’un homme. C’est pourquoi Miller, jusqu’alors célébré pour son écriture doit faire appel à un copain pour continuer à travailler. Une supercherie propice à des situations assez cocasses et périlleuses, que le choix du prête-nom favorise par son côté « tranquillos ». Howard, optimisme à tout crin, va pourtant se heurter à la réalité de la vie et aux tracasseries administratives.
Surtout que Hecky, le comique en vogue, devenu son meilleur ami est lui aussi maintenant sous la coupe des censeurs politiques. Pour s’en tirer, on lui demande, comme à beaucoup d’autres, de collaborer. La délation et la trahison prennent le pas, et devinez qui sera le dindon de la farce…
Martin Ritt a du répondant face aux situations détestables que notre héros conjure jusqu’au bout d’une insouciance feinte et protectrice. Le personnage colle très bien au jeune Woody Allen de l’époque avec un casting convaincant : Zero Mostel, le comique, Andrea Marcovici, l’amie d’Howard, et tous ses fieffés coquins garants d’une Amérique qui luttaient en fait contre leur propre pays.
La dernière scène est à ce titre éloquente. Et des scènes du genre, « Le prête-nom » n’en manque pas. Je vous citerais bien celle de la rencontre autour d’une table entre le héros et sa petite amie : succulente, savoureuse. Woody Allen, avant la lettre…
- « La liste noire », entretien avec Jean Douchet (13 mn)- L’historien du cinéma raconte le metteur en scène « principalement représenté par un cinéma de pensée politique. (…) Il a pour les américains, des opinions d’extrême-gauche, ce qui dans le pays parait énorme. Le maccarthysme est alors un véritable poison pour le cinéma américain ; on ne les interdisait pas, on conseillait de ne pas collaborer avec eux .La souffrance que ces gens ont connue, c’est ce que rapporte le film ».
Jean Douchet l’analyse ensuite autour des renversements incessants de situations : « toujours une brusque rupture entre ce que l’on attend et ce qui arrive ». Il évoque aussi l’attitude d’Elia Kazan qui dénoncera ses camarades…
Review Overview
Le film
Le bonus
C’est un film qui dénonce, mais sans les grands sabots de la propagande. Surtout qu’il s’agit de l’époque du maccarthysme quand les artistes communistes étaient priés d’aller voir ailleurs. Un temps révolu, mais le fond du problème (délation, trahison, suspicion et liberté de pensée) doit toujours nous tenir en éveil.
C’est ce que dit avec finesse, humour et fermeté Martin Ritt , bien secondé par une écriture merveilleuse, des dialogues à se relever la nuit : Woody Allen aurait pu en être l’auteur. Ici, il se contente d’interpréter fort bien le personnage du prête-nom avec une affiche confortable. Plusieurs scènes devraient figurer dans une anthologie du cinéma américain. C’est grandiose…
Avis bonus
Le point de vue de Jean Douchet...
14 Commentaires
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