Synopsis: Le scénariste Amitabha Roy tombe en panne près d'un salon de thé. Le gérant des lieux lui propose de le loger le temps de pouvoir repartir. Il ne se rend pas compte alors de la gêne qui règne entre son invité et sa femme Karuna. Ils ont été amants…
La fiche du film
Le Film
Coffret Satyajit Ray 01er Mars 2022
« La Grande Ville », « Charulata« , « Le Lâche », « Le Saint », « Le Héros » et « Le Dieu éléphant »
- D’après l’œuvre de Premendra Mitra
La situation n’est pas commune. Deux anciens amants se retrouvent quelques années plus tard, sous le même toit. Amitabha a accepté la proposition du mari de le loger pour la nuit, le temps que l’on répare sa voiture.
Karuna sa femme (Madhabi Mukherjee ) a bien du mal à cacher sa stupéfaction, mais très vite reprend le rôle assigné par son époux. Un individu plutôt satisfait de sa personne, même si après quelques verres, il n’est que plaintes et divagations.
Une compagnie peu agréable imagine l’invité qui pense là pouvoir reconquérir le cœur de sa belle.
Mais dès l’apéritif, ses coups d’œil furtifs ne trouvent aucun regard de la part de Karuna. Elle joue la maîtresse de maison parfaite. Dans les quelques apartés avec son ancien compagnon, elle est sans ménagement.
Piquante, ironique, amère. Rien du souvenir de cet autrefois que le jeune homme revit comme un cauchemar, ne trouvant à la place du sommeil que les regrets de sa conduite passée.
La gêne a fait place à la tension, au milieu des élucubrations avinées du mari (Haradhan Bannerjee). Sous son air bonace, en joue-t-il, en profite-t-il ?
La mise en scène de Ray est à la fois, si indécise et précise quand il faut appuyer là où ça fait mal. Il parle du renoncement et de la fidélité, de l’amour impossible, du malentendu …
Le plus étonnant, son évocation de la fracture sociale de son pays à travers la proposition de scénario que fait le mari au sujet des castes . « Un directeur ne parle qu’à un directeur, vous seriez mon assistant on ne prendrait pas le thé ensemble … »
« Pas d’état d’âme, de cas de conscience ? » lui demande le scénariste .
En amour comme en affaire Ray nous met ainsi dans l’inconfort des situations, sans échappatoires possibles, sinon cette résolution scénaristique finale qui ne manque pas de piment. A la manière d’une pirouette , d’un pied de nez d’opérette …
- À propos de… Entretien avec Charles Tesson – Critique, historien du cinéma et auteur du livre « Satyajit Ray ».
Un film peu distribué, peu montré en raison de son format .Satyajit Ray compose lui-même la musique de ses films et est très sensible aux accords de ton. Peut-être le film le plus profond sur l’amour et le malentendu, l’enchevêtrement du passé et du présent …
Le Film
Ca pourrait être une pièce de théâtre, comme un huis-clos amoureux autour d’un triangle du même genre, mais dramatiquement bancal sous le regard aigu de Satyajit Ray. Un homme invite un autre homme a passer la nuit chez nuit en attendant la réparation de sa voiture. Les deux individus ignorent alors bien évidemment qu’au foyer les attend la même femme, que l’un a aimé, et que l’autre a prise pour épouse. Un porte à faux singulier sur lequel deux comédiens extraordinaires , Madhabi Mukherjee et Soumitra Chatterjee, jettent le discrédit d’une histoire sentimentale qui n’a jamais été assumée. Ces retrouvailles si particulières vont-elles permettre de reprendre le fil d’une histoire ancienne que quelques apartés nous permettent de comprendre totalement ? C’est l’enjeu de ce film apparemment sans conséquence sur la dramaturgie du cinéma. Et pourtant si prégnant dans sa forme comme dans le fond. Un moyen métrage, mais si long et bon dans sa résolution.