Synopsis: Leo écrit des romans à l'eau de rose sous le pseudonyme d'Amanda Gris, reine du genre. Son mari Paco ne l'aime plus, mais elle nie l'évidence et s'accroche. Pour la sortir de sa déprime, son amie, Betty l'envoie à Angel, rédacteur en chef à El Pais et grand admirateur d'Amanda Gris, qui ignore qui elle est...
La fiche du DVD / Blu-Ray
Le film
Les bonus
Ce dvd fait partie du coffret « Pedro Almodovar, l’anthologie » (1)
Meilleur dvd Novembre 2016 ( 4 ème )
J’ai perdu le fil rouge, forcément rouge, chez Almodovar, d’une filmographie qui me revient avec bonheur dans cette anthologie. Je redécouvre le plaisir d’un cinéaste qui rend grâce aux femmes. « Il comprend leur complexité » dit Marisa Paredes, comédienne attitrée de son théâtre. « Parce que la femme s’ouvre plus que les hommes, et est capable d’aimer jusqu’au désespoir et aussi haïr jusqu’au désespoir, de survivre et de l’assumer sans honte ».
Marisa Parades est dans « La fleur de mon secret » Léo, cette héroïne à fleur de peau et d’amour pour un homme qui la rejette. Mais elle ne veut rien entendre, et prend encore la vie par la racine que sa mère tente désespérément d’arracher. Une maman dont la cohabitation avec son autre sœur (Rossy de Palma, comme un poisson dans l’eau(*) n’est pas de la première tendresse.
On s’en amuse, mais la douleur affective pointe à chaque remarque de l’une ou de l’autre, avant que Léo ne tente de s’interposer dans ce récit qu’elle rature aussi à sa façon. Léo est romancière, et sous un pseudonyme, Amanda Gris, glane le succès d’une œuvre à l’eau de rose. Un style qu’elle critique sous son vrai nom, cette fois, dans une revue très en vogue que dirige Angel qui lui est fou amoureux de cette Amanda. Un très beau rôle pour Juan Echanove.
Il y a toujours beaucoup de mystification chez Almodovar, ici plus amusée, moins contrainte. Les premières pages de « Volver » qui verra le jour dix ans plus tard prennent déjà forme sous la plume de cette Amanda Gris. La romancière par substitution y évoque la mort d’un homme, un congélateur pour linceul…
Entre l’être et le paraître, le réalisateur n’opte pas pour une définition raisonnée de l’âme féminine, abandonnant lui aussi Léo à sa détresse amoureuse, sa fragilité presque maladive, ses errements professionnels et intellectuels.
Marisa Parades se saisit de ce personnage avec une humanité formidable, quasi désespérée. Un portrait complexe et ambigu d’une héroïne qui pourra encore nous faire sourire quand son propre malheur rejoindra celui de sa maman, qui parait-il s’inspire beaucoup de celle du réalisateur. Chus Lampreave est magnifique.
Elle vit dans une maison que dix ans plus tard nous retrouverons là encore dans « Volver ». La disparition d’une autre mère mettra en émoi plus d’une habitante. Certaines d’entre elles ont en effet aperçu cette femme morte dans un incendie. Vous avez dit imposture ? Mystification, peut-être…
(1) Egalement disponible à l’unité.
Littérature : Pedro Almodovar : » Le dernier rêve »
LES SUPPLEMENTS
- Pedro Almodovar. « J’ai d’abord voulu filmer l’enfer de vivre à deux » raconte le cinéaste qui sans transition affirme être l’un des meilleurs directeurs d’acteurs – il sait les diriger, c’est une évidence – « avec Woody Allen et Ingmar Bergman, mais je ne suis pas un bon acteur ».
- Marisa Parades.« Il faut se donner à lui comme à un amant, il connait bien ses personnages, il les écrit, les sent, les pense jusque dans ses rêves ».
- Juan Echanove.Celui qui joue très bien le directeur de la publication dans laquelle Léo va tenir une rubrique, n’est pas forcément le plus connu de la palette Almodovar. Conscient de cet état de fait, il se réjouit d’avoir été retenu par le cinéaste espagnol, c’est pour lui « l’opportunité d’être vu dans le monde entier ».
- Autour du film. « 90 % des répliques sont des phrases que j’ai entendues chez moi, auprès de ma mère et de ma sœur. (…) Et la cuisine est identique à celle qu’avait ma mère ».
(*) Un personnage qui ressemble à la Gloria de Carmen Maura dans » Qu’est-ce que j’ai fait pour mériter ça ? » du même Almodovar.
Le film
Les bonus
Dans la longue liste des prétendantes au cinéma d’Almodovar, Marisa Parades et Rossy de Palma figurent à merveille l’illustration du bonheur de filmer des femmes. Des rôles jamais convenus et une histoire à l’emporte-pièce, souvent, qui donne le tournis aux sentiments et aux émotions.
On retrouve ici la délicatesse et la grâce d’un réalisateur toujours emporté par des élans de mélancolie et de questionnements autour de l’âme et de ses errements. « Voici une femme faite pour l’anxiété » dit l’héroïne en préambule à sa vie qui n’est que désespoir, et attente. Des perspectives peu engageantes qu’elle conjure par la mystification de sa personnalité appelée maintenant à connaître le succès sous un pseudonyme. Je devrais plutôt dire un nom d’emprunt, le démarquage demeurant aussi l’une des caractéristiques des films d’Almodovar. Je ne pense pas que « La fleur de mon secret » symbolise à lui seul un style, mais ce film déboussolé, désorienté représente bien une tendance dans son cinéma où il rend toujours grâce aux femmes.
Et les femmes le lui rendent bien, offrant à sa caméra une palette de sentiments vrais, d’émotions partagées sur le rouge aux lèvres et les joues rebondies.
Avis bonus
Des rencontres, toujours éclairantes
3 Commentaires
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