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« La belle et la meute » de Kaouther Ben Hania. Critique dvd

Synopsis: Lors d'une fête étudiante, Mariam, jeune Tunisienne, croise le regard de Youssef. Quelques heures plus tard, Mariam erre dans la rue en état de choc. Commence pour elle une longue nuit durant laquelle elle va devoir lutter pour le respect de ses droits et de sa dignité. Mais comment peut-on obtenir justice quand celle-ci se trouve du côté des bourreaux ?

La fiche du DVD / Blu-Ray

Le film : "La Belle et la meute"
De : Kaouther Ben Hania
Avec : Mariam Al Ferjani, Ghanem Zrelli, Noomen Hamda, Mohamed Akkari, Chedly Arfaoui
Sortie le : 04 avril 2018
Distribution : Jour2Fête
Durée : 96 minutes
Film classé : Tous publics
Nombre de DVD / Blu-Ray : 1
le film
Les bonus

On apprend à la fin que cette histoire est vraie. Le révéler ne change rien au chaos qui vous submerge. Dans cette nuit de cauchemar kafkaïen tous les droits d’une jeune femme tunisienne vont être bafoués par stupidité, lâcheté, et cruauté.

Mariam a été violée. Quand elle dénonce le crime, on lui oppose des lois qui n’ont pas pris en compte d’autres préjudices. Le vol de son portefeuille par exemple. Mariam ne peut justifier de son identité, le registre de la clinique lui est fermé.

Début du calvaire. A peine si on la croit («  vous n’avez pas l’air de souffrir beaucoup » lui dit-on à l’hôpital), menue et apeurée dans sa petite robe de soirée qui l’accuse de tous les maux. Mariam s’apprêtait à faire la fête, on la traîne comme une malpropre, de bureau en salle d’attente, en quête du papier officiel.

Sans dépôt de plainte, le légiste ne peut rien faire. Le dépôt de plainte c’est la police, et la police ne serait pas étrangère au drame. On tourne en  rond, on l’abrutit, elle s’obstine…

Des services de soin à la soi-disante Sécurité, l’image est déplorable. Celle que renvoie Kaouther Ben Hania, la réalisatrice, pour qui le viol demeure l’acte suprême de la barbarie. Elle n’en montre rien ou si peu (et la manière est admirable)  pour souligner les travers d’une administration dont les égarements conduisent la victime à devenir coupable, l’innocent,un suspect.

C’est le sort du jeune homme ( Ghanem Zrelli) qui accompagne Marian. Sa seule présence irrite les policiers. L’effet miroir de son supplice augmente la gravité de la situation d’un pays retourné  dans tous les sens de ses maux, et de ses contradictions.

« Dieu les punira » pensait-elle avant de revoir ses bourreaux dans la cour du commissariat. Hilares, menaçants, cruels. Elle va alors les combattre, soutenir leur hargne, leurs mensonges, leurs menaces réitérées. Mariam Al Ferjani est tout aussi admirable dans son interprétation.

Son obstination est exemplaire, et gratifiante pour l’issue d’un procès qui aura bien lieu. Autour de quelques cœurs purs, des fonctionnaires responsables et honnêtes qui viendront lui apporter la lumière chassant cette nuit horrifique avec tous ses fantômes.

Depuis, la Tunisie a retrouvé un semblant de quiétude. La réalisatrice conclue sur un discours sécuritaire en forme de morale patriotique. Reflète-t-il l’esprit tunisien qui veut protéger le pays de ses démons, et de ses ennemis extérieurs, le plus souvent imaginaires ?  Une position confortable quand  le mal vient obligatoirement de l’étranger.

LES SUPPLEMENTS

  • Scène coupée (7.41 mn). Elle est assez étrange et la retenir dans le montage final aurait peut-être allégé le récit, sans pour autant lui permettre d’évoluer comme la réalisatrice l’entendait.

Il s’agit de l’identification des suspects puis du sermon en forme de légende que leur fait un collègue sur le roi nu à qui personne n’ose dire de se couvrir les fesses… Ils se font ensuite copieusement engueulés … avant de se rejeter la faute les uns sur les autres

Une scène qui explique beaucoup de choses

  • Entretien avec la réalisatrice (20 mn). L’ouverture se fait avec le philosophe Michel Onfray qui vient de voir le film. Il interview la réalisatrice, autour de son trajet professionnel, sans études de cinéma, mais de commerce pour faire plaisir aux parents.

«  Quand je suis revenu à Tunis, j’ai rencontré des cinéastes amateurs et tout est parti de là ». Elle explique sa manière de travailler, notamment autour du plan séquence « qui n’est pas facile mais indispensable pour raconter ce genre d’histoire, un lien organique cette caméra qui avance tout le temps, qui porte l’histoire. »

Avec la comédienne « on a imaginé son monologue intérieur, et je l’ai écrit, ce qui m’a permis de réécrire les dialogues, de les charger de non-dit, des peurs, des angoisses, et cela permettait à la comédienne de savoir comment elle devait jouer ».

On apprend à la fin que cette histoire est vraie. Le révéler ne change rien au chaos qui vous submerge. Dans cette nuit de cauchemar kafkaïen tous les droits d’une jeune femme tunisienne vont être bafoués par stupidité, lâcheté, et cruauté. Mariam a été violée. Quand elle dénonce le crime, on lui oppose des lois qui n’ont pas pris en compte d’autres préjudices. Le vol de son portefeuille par exemple. Mariam ne peut justifier de son identité, le registre de la clinique lui est fermé. Début du calvaire. A peine si on la croit («  vous n’avez pas l’air de…
le film
Les bonus

Le titre est explicite, après le viol d’une jeune femme qui aura toute les difficultés du monde, et même pire, pour faire admettre son préjudice et pouvoir punir les coupables. C’est toute l’administration tunisienne, de la santé à la sécurité qui chavire sous les coups de vérité que la victime assène avec une obstination qui sera payante. De cette histoire vraie, le pays a tiré quelques leçons et notamment revu sa loi sur l’atteinte aux personnes. Il reste pour la jeune étudiante une nuit de cauchemars et d’humiliation que la réalisatrice film avec un réalisme total, secondée parfaitement par l’interprétation de Mariam Al Ferjani. AVIS BONUS Une longue scène coupée, très intéressante à découvrir et l'interview de la réalisatrice par Michel Onfrey

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