Synopsis: A travers les propos et les écrits de l'écrivain noir américain James Baldwin, Raoul Peck propose un film qui revisite les luttes sociales et politiques des Afro-Américains au cours de ces dernières décennies. Une réflexion intime sur la société américaine, en écho à la réalité française. Les mots de James Baldwin sont lus par Joey Starr dans la version française et par Samuel L. Jackson dans la version américaine. Que je vous recommande.
La fiche du DVD / Blu-Ray
Le documentaire
Les bonus
Sur un mode mineur « American Pastoral » récemment sorti en dvd renvoie à ce grand documentaire dont la puissance historique et émotionnelle fait plutôt référence à des titres comme « Free Angela, and all political prisoners » de Lee Daniels, « Black Powers » d’Agnès Varda, « Sidewalk stories » de Charles Lane ou bien encore « 12 years a slave » de Steve McQueen.
Le panel cinématographique très très large relève l’inlassable combat des noirs américains pour conquérir un bout de cette terre qui dit-on est le pays de la liberté. James Baldwin a beaucoup écrit sur cette hypocrisie de l’Histoire. Lynchages dans les États du Sud, émeutes raciales de Los Angeles (1965) à Oakland (1968), depuis le XIX ème siècle jusqu’au mouvement « Black Lives Matter », les faits n’ont rien de divers. Ses conférences, parfaitement maîtrisées (bel orateur) ont marqué toute une population et les trois figures mythiques qui encadrent le documentaire : ses amis Martin Luther King Jr, Medgar Evers, et Malcolm X.
L’écrivain au milieu de ses amis lors d’un des nombreux rassemblements de protestation…
Intelligemment construit sur un montage qui alterne les images d’archives, les extraits de films (dont beaucoup de westerns qui véhiculent la vengeance naturelle), et les prises de paroles des acteurs de l’époque (« un geste moral futile… » dira Robert Kennedy quand on lui demande d’intervenir), « I am not your negro » révèle avec force et conviction toute l’endurance d’un peuple broyé dès son plus jeune âge. L’intégration sous escorte policière des lycéens noirs illustre parfaitement le discours de Baldwin pour qui l’Amérique dans son propre système de fonctionnement ne laisse aucune place aux noirs.
Un constat mêlé aux revendications toujours réprimées par des moyens qui aujourd’hui encore matraquent l’actualité des USA. Ce documentaire est un réquisitoire. Les images de lapidation sont atroces, à peine commentées, si ce n’est pour laisser l’indifférence des quelques témoins reprendre ses droits. Raoul Peck a un regard très pessimiste sur l’environnement apporté par l’écrivain qui affirmait à l’époque ne pas l’être, car il était toujours en vie, disait-il. Après avoir vu assassiner ses trois amis tutélaires et constater que la violence ne faisait qu’empirer.
Une figure comme Sidney Poitier au cinéma adoucit un peu la peine et les souffrances de la communauté noire qui pourtant ne se reconnait pas toujours dans les prestations de son acteur. « Devine qui vient diner ce soir » est ainsi défavorablement accueilli nous rappelle Raoul Peck, contrairement à « Dans la chaleur de la nuit » paru la même année. L’image du négro n’est plus alors l’enfant docile et benêt du cinéma yankee.
Un peu de baume sur la colère contenue de ce film porté telle une déflagration sur ce territoire qui ne contient pas toute la haine et la cruauté des hommes. Sans faire le tour du Monde, arrêtons-nous sur notre petit bout de terre…
LES SUPPLEMENTS
- Entretien avec le réalisateur (25 min). Raoul Peck explique qu’il a imaginé ce documentaire « dans un système de crise – politique, culturelle, sociale-, j’ai voulu avoir un système défense et ce fut Baldwin dont la pensée revenait ici et là sans qu’il ne soit jamais cité. (…) Dans ma jeunesse il m’a aidé à me structurer, et cela me paraissait alors fondamentale de revenir vers lui ».
« C’est sa parole qui est en avant, moi réalisateur je reste au second plan » précise-t-il avant de détailler son histoire avec les ayants droits dont Gloria Baldwin qui participe aussitôt au projet, donne accès à tout, dont les archives, des lettres jamais publiées, « année après année elle a continué à me nourrir ».
Raoul Peck insiste ainsi sur le projet de livre qu’avait Baldwin et qu’il avait commencé à écrire, les notes vont lui donner les personnages clés, qu’il a placés dans un triangle, c’est la trame qu’il utilisera pour le documentaire.
Il est intéressant aussi de l’entendre parler sur le discours dominant, celui du vainqueur, avec des extraits cinématographiques (« La case de l’oncle Tom »). Il évoque « le travail de déconstruction phénoménale de Baldwin ». L’exemple qui suit est celui de « Qui vient dîner ce soir », « un film progressiste à mes yeux à l’époque » dit Raoul Peck qui lira par la suite les écrits de James Baldwin…
- James Baldwin à propos de son enfance à Harlem (1971 ; 15 min)- Extrait de « Italiques » de Gérard Poitou-Weber, journaliste Danièle Guibert. L’homme se raconte à travers son enfance quand on n’a pas encore conscience de la couleur de sa peau. « Mais on se rend compte que l’on est méprisé, on ne sait pas pourquoi, on se rend compte que l’on est en danger, on ne sait pas pourquoi … ».
Sur un extrait de « L’homme qui meure » ( à Harlem un soir, arrêté par des policiers en compagnie de son frère) , des images de James Baldwin en toute liberté dans la rue font contre point à la narration.
Il évoque aussi les conditions de vie dans le ghetto d’Harlem « je frôlais la folie, la drogue, le crime, et donc la mort il fallait que je parte, que je quitte le pays ».
- « Un Étranger dans le village », documentaire de Pierre Koralnik (1962 ; 30 min)- D’après « Notes of a native son » de James Baldwin. Cela se passe en Suisse, mais pourrait bien prendre d’autre décor. Ce qui frappe, c’est le blanc de la neige en opposition à ce visiteur de couleur. James Baldwin livre ses commentaires vis-à-vis du comportement des autochtones, ou le racisme ordinaire et universel.
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Racisme, xénophobie, ségrégation, d’autres films dans ce blog :
- « The Intruder » de Roger Corman » Detroit » de Kathryn Bigelow
« Get out » de Jordan Peele
« Dear white people » de Justin Simien
« L’homme qui défiait l’infini » de Matt Brown.« American Pastoral » de Erwan McGregor
Le documentaire
Les bonus
« J’en sais plus sur vous que vous sur moi, car vous n’avez jamais eu à me regarder, moi j’ai dû le faire, j’ai cet avantage… ». C’est en voix off que Samuel L. Jackson prête son talent aux paroles de l'écrivain noir américain James Baldwin, dont les écrits trouvent ici une illustration puissante à travers le documentaire de Raoul Peck. L'autre Histoire de l'Amérique. Une véritable déflagration qui chamboule très intelligemment les images d’archives, les nombreux extraits de films (dont beaucoup de westerns) et de la télévision, et les prises de paroles des témoins de l’époque (« un geste moral futile… » dira Ro bert Kennedy quand on lui demande d’intervenir). Si ce documentaire passionnant et édifiant dénonce ce que l’on savait déjà, il nous rappelle surtout que rien n’est jamais acquis dans bien des domaines et particulièrement ceux de la tolérance, du respect et de la dignité. AVIS BONUS Le réalisateur donne un excellent point de vue sur le contexte qui a conduit à son film. Et la présence de James Baldwin en Europe est aussi un grand document...
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