Synopsis: 1842-1844. L’histoire de la famille Simon. Johann le père forgeron, Margret la mère, Lena la fille ainée, Gustav et Jakob les fils, Jettchen et Florinchen leurs futures épouses. Les coups du destin risquent de détruire cette famille. Des dizaines de milliers d’Allemands, accablés par les famines, la pauvreté et l’arbitraire des gouvernants, émigrent en Amérique du Sud. "Un sort meilleur que la mort, ça peut se trouver partout".
La fiche du DVD / Blu-Ray
Le film
Le bonus
Prusse 1842. A travers la famille Simon, père forgeron et les fils devront suivre, Edgar Reitz évoque l’avenir d’un pays qui, tenu par les bourgeois des villes et des campagnes, sent imperceptiblement le besoin d’aller voir ailleurs. Besoin de s’éloigner de la religion, de la misère et des conditions de travail qu’impose une nature le plus souvent hostile.
Dans le noir et blanc profond, très tranché (à l’exception de quelques intrusions pointillistes pour un drapeau, une robe, une agate …) la force du destin est encore plus prégnante. On y côtoie des gens de petites conditions qui des champs à la vigne, de la forge à la tannerie, rythment le quotidien de ce village imaginaire, posé dans la région de Hunsrück.
J’ai eu du mal à m’y faire : il sent vraiment le décor (avec ses bicoques parfaitement délabrées), et l’aménagement spécifique pour une mise en scène, tirée au cordeau.
Mais Reitz est un conteur de première et un portraitiste qui ne se lasse pas de reprendre les traits de ses compagnons d’infortune pour évoquer l’avènement d’un pays. L’un des fils Simon, Jakob, est particulièrement visé par le propos : un jeune homme qui refuse sagement la condition familiale, pour rêver d’un exil que des centaines de concitoyens ont déjà suivi.
Pierrot lunaire, Jakob s’intéresse aux sciences, aux techniques nouvelles et apprend l’amérindien, pour s’installer un jour au Brésil. Il éduque sa petite amie, mais oublie de lui dire qu’il l’aime…
Un brin utopiste, peut-être, on s’en moque gentiment, partagé entre une mère aimante et compréhensive, et un père autoritaire.
Une famille qui reproduit le système social de la Prusse d’alors, où les travaux des champs et de la vigne succèdent aux travaux des artisans du village, qui ne manque pas de faire la fête, aussi.
La scène du bal est à ce titre édifiante ; interminable, elle nous emporte dans son tourbillon de folie et d’espoir, un peu à l’image de « La porte du Paradis ». Une soupape pour la liberté entrevue par quelques esprits éclairés, dont la révolte souterraine prend de plus en plus racine sur la terre infertile des paysans résignés.
Edgar Reitz en fait une vaste chronique, une histoire sans fin des hommes sous le joug, des barons tout puissants, et des chaînes qui se brisent. Un récit puissamment illustré par la conviction de son réalisateur (la caméra n’enregistre plus, elle participe) et le jeu réaliste des comédiens.
- Entretien avec Pierre Eisenreich (20 mn)
Il retrace la carrière d’Edgar Reitz, à travers une analyse très synthétique du film. C’est court et pertinent .
Review Overview
Le film
Le bonus
Prologue en quelque sorte à la série TV sur la famille Simon, des prussiens en 1842 qui aspirent à un pays nouveau, ces quatre heures de cinéma posent les bases d’une chronique villageoise qui tient à la fois du conte et du récit historique. Edgar Reitz ne se sert pas de la caméra, mais l’utilise au même titre qu’un comédien, ce qui donne cette puissance scénique à des séquences émotionnellement très fortes. Dans le froid, la neige ou les travaux des champs, à la forge, ou à la tannerie, le cinéaste élabore ainsi une mise en scène d’une époque propice aux changements sociaux et politiques que quelques esprits éclairés s’évertuent à mettre en œuvre. C’est parfaitement démontré dans un village trop bien posé pour le décor. Un détail au regard du rendu cinématographique : un noir et blanc tout à fait révélateur d’une atmosphère, d'une ambiance, d'une époque.