Synopsis: 1961 - La philosophe juive allemande Hannah Arendt est envoyée à Jérusalem par le New Yorker pour couvrir le procès d'Adolf Eichmann, responsable de la déportation de millions de juifs. Les articles qu'elle publie et sa théorie de "La banalité du mal" déclenchent une controverse sans précédent
La fiche du DVD / Blu-Ray
Le film
Les bonus
- Décembre 2014 : le meilleur dvd
- La fiction
Hannah Arendt, de Margarethe von Trotta
L’extermination des juifs à travers le procès de l’un de ses responsables, Adolf Eichmann. Hannah Arendt, qui a connu des camps d’internement en France, est juive allemande, et philosophe. Elle suit ces événements pour le journal le New Yorker. En toute objectivité, même si elle laisse passer quelques audiences, « l’élève préférée d’Heidegger » relate ce qu’elle entend, et surtout en tire des conclusions, qui ne sont pas forcément celles qu’attendait la communauté juive.
Notamment ses amis proches, qui vont d’abord s’opposer à sa version, avant de l’attaquer frontalement. Hannah Arendt va se retrouver seule contre le monde entier, mais sa force de caractère (de l’arrogance, dit-on dans son entourage) lui permettra de tenir envers et contre tous.
C’est ce que montre ,magistralement et simplement, la réalisatrice Margarethe Von Trotta qui donne à voir une réflexion, un état d’esprit. C’est peu commun dans le cinéma, d’autant plus qu’elle les met en scène avec la technique d’une fiction cinématographique, tout à fait classique. On assiste à une représentation, presque à un spectacle qui nous raconte le cheminement d’une pensée.
Les questions posées par le cas Eichemann facilitent-elles le processus ? Ce sont des interrogations que soulève en préambule la philosophe : juge-t-on un homme, ou l’Histoire ? Pour illustrer la thématique la réalisatrice s’appuie sur les images d’archives du procès qu’elle mêle très subtilement à ses propres images.
C’est assez bien ciblé pour permettre au spectateur de s’orienter facilement dans ce dédale de réflexions et choisir son option : même si le fond demeure l’Histoire, et est donc irréversible, assiste-t-on à une pure fiction ou à un documentaire romancé ?
En estimant qu’Eichemann était un « individu horriblement normal qui obéissait aux ordres », Hannah Arendt ne s’oppose pas un instant à la sentence : la pendaison. Car ce qu’elle retient avant tout de ce procès c’est qu’il doit traiter un fait historique, plutôt que les actes d’un homme.
« Sans le totalitarisme on n’aurait jamais connu la nature radicale du mal » dit-elle, élaborant la fameuse théorie de « la banalité du mal » qui sera à l’origine de toutes ses déconvenues.
Je l’ai écoutée et regardée avec une ferveur inattendue, oubliant que Margarethe Von Trotta était derrière la caméra et que la philosophe en question, n’était qu’une comédienne dépêchée pour les besoins d’un film : Barbara Sukowa, elle aussi exemplaire dans sa démarche d’artiste. Symbiose parfaite.
Les suppléments
- Dans la collection TV « Un certain regard », rencontre avec Hanna Arendt. (50 mn) 1974.Après avoir évoqué ce qu’était l’Amérique au regard de sa constitution, la philosophe revient sur ses grandes thématiques.« Réfléchir c’est penser de manière critique, il n’existe pas de pensée dangereuse, puisque le simple fait de penser est déjà dangereux, mais ne pas réfléchir c’est encore plus dangereux »
La naissance du mouvement sioniste, le totalitarisme (« la dictature est limitée dans le temps, la tyrannie ne l’est pas ») le cas Eichemann sont aussi au programme de cette discussion qui éclaire encore plus sa personnalité.
- Entretien avec la réalisatrice. « Le parti pris était de se concentrer sur l’activité principale d’Hannah Arendt, qui était de penser. On aurait pu faire un film d’action (son exil en France, son arrestation, son évasion, sa fuite pour les Etats-Unis, où elle arrive sans connaître un mot du pays..), mais on a préféré choisir un moment dans sa vie, les quatre ans autour d’Eichemann ».
Margarethe von Trotta parle aussi beaucoup de ses doutes intérieurs avant de passer à la réalisation de ce film, « comment montrer son envergure, sa clairvoyance, sa radicalité de pensée ?… ».
- Entretien avec Alain Finkielkraut. Cynthia Fleury et Rony Brauman.Le philosophe pose un regard critique sur certains attendus du livre d’Hannah Arendt « Eichmann à Jérusalem », et sur le film .
La psychanalyse évoque ce à quoi correspond aujourd’hui « la banalité du mal », tandis que l’ancien président de Médecin sans frontière l’applique à sa propre expérience quand il était en Somalie.
Le documentaire
Un Spécialiste, de Eyal Sivan et Rony Brauman : c’est le film qui a inspiré Margarethe von Trotta !
Le procès extraordinaire d’un homme effroyablement ordinaire. Réalisé à partir des 350 heures d’images inédites enregistrées lors du procès d’Adolf Eichmann à Jérusalem, en 1961, ce film sur l’obéissance et la responsabilité dresse le portrait d’un spécialiste de la solution des problèmes, un criminel moderne.
- Supplément : Entretien avec Rony Brauman (11mn), Alain Finkielkraut (17mn) et Cynthia Fleury (17mn)
- Le livre : Eichmann à Jérusalem, de Hannah Arendt
Review Overview
Le film
Les bonus
C'est plus qu’un portrait magnifique que nous brosse ici Margarethe Von Trotta, à travers le cheminement de la pensée de la philosophe Hannah Arendt à l’issue du procès Eichemann à Jérusalem en 1961. Elle met en scène une réflexion, un état d’esprit, et le fait avec une telle maestria que le spectacle du cinéma demeure entier, tout en nous confrontant à quelques arguties philosophiques qui en d’autres lieux pourraient nous conduire au sauve qui peut. L’interprétation sobre de Barbara Sukowa est au diapason d’un film rare.
Avis Bonus : Rencontre avec la réalisatrice, la philosophe ( " Un certain regard", émission TV ) et des intervenants ,philosophe, psychanalyste, où l'on apprend encore beaucoup , avec un grand plaisir
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