Synopsis: Au lendemain de la guerre 14-18, dans une petite ville allemande, Anna se rend tous les jours sur la tombe de son fiancé, Frantz, mort sur le front en France. Mais ce jour-là, un jeune français, Adrien, est venu se recueillir sur la tombe de son ami allemand. Cette présence à la suite de la défaite allemande va provoquer des réactions passionnelles dans la ville.
La fiche du film
Le film
Un film à la manière de… est-ce bien nécessaire ? Peut-être pas façon Lubitsch qui en 1932 réalise le premier cette adaptation d’une pièce de Maurice Rostand, publiée en 1930 « L’ami que j’ai tué ». Mais la patte des années 30-40 traîne habilement dans ce remake que François Ozon exécute avec application et respect.
Le noir et blanc superbe pose joliment l’atmosphère de ces années d’après-guerre où la pierre à peine oubliée dans la ruine opte pour les couleurs de la mélancolie. De la nostalgie aussi. Adrien, l’ami français de Frantz, mort au champ d’honneur a perdu beaucoup de son audition au cours des combats. Mais le vent qui s’engouffre dans les arbres du cimetière lui rappelle cette musique.
Ambiance compassée dans le souvenir de ce jeune homme pour lequel Adrien conserve une indestructible amitié. C’est ce qu’il est venu dire à sa fiancée, à ses parents, au cœur d’un mal qui ne s’est jamais refermé. La douleur, la perte d’un être cher, le mal d’une patrie revancharde.
Le village est hostile à la présence du français, mais la maman d’Adrien lui ouvre très vite les bras. Elle va enfin savoir, entendre, comprendre les derniers jours de son fils. Ou peut-être autre chose quand on ne parlait pas encore de faire son deuil. Sous les fleurs de la tombe, il n’y a pas de cendre. Le corps est enterré anonyme, quelque part en France. Mais seul le geste compte et maintenant la présence de ce témoin qui parle peu, tant les questions fusent de la part de ces parents qui retrouvent un enfant.
La caméra de François Ozon opte pourtant bien pour le doute et les silences. Pour une toute autre vérité qu’Adrien s’apprête à révéler, mais que personne ne veut encore entendre. Ce mystère, bien entretenu par une mise en scène au cordeau, creuse le visage timide et tourmenté que Pierre Niney, adopte sans jamais trahir de véritables sentiments. Une expression forte et particulière qui peu à peu va déstabiliser celle qui pensait n’avoir qu’un grand amour.
Paula Beer, la révélation de ce film adopte elle aussi la tenue de circonstance, la retenue qui sied à son veuvage. Une modération, marque de fabrique plus que de mise en scène de la part d’un réalisateur qui n’en finit pas d’explorer les arcanes et les genres du cinéma. Le voici entre mélo et romantisme, quasiment revenu aux sources. Comme un reliquat du passé…
Le film
Ce manifeste pacifique demeure toujours d’une grande importance au regard de notre monde bringuebalé dans ses turpitudes. Mais faut-il pour s’en souvenir, revenir aux sources de l’œuvre, origine contrariée par un autre savoir-faire que François Ozon a déjà expérimenté à de nombreuses reprises, lui qui ne se cantonne jamais à un genre unique. C’est donc un peu à la manière des années 30-40 que le cinéaste aborde très méticuleusement, et avec un respect infini dans sa mise en scène cette histoire d’amitiés contrariées par des événements dramatiques. A la vérité historique, on préfère alors le mensonge profitable, élément dramaturgique ici retranscrit fidèlement dans le jeu tourmenté de Pierre Niney. Si le comédien français confirme un peu plus chaque jour la variété de sa palette, la véritable révélation de ce film Paula Beer, une très jeune comédienne allemande voit désormais l’Europe s’ouvrir à son grand talent.
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