Synopsis: Rahima, 23 ans, et son frère Nedim, 14 ans, sont des orphelins de la guerre de Bosnie. Ils vivent à Sarajevo, dans cette société transitoire qui a perdu toute compassion pour les enfants de ceux qui sont morts pendant le siège de la ville. Elle travaille dans un restaurant où elle est exploitée, il trafique …
La fiche du DVD / Blu-Ray
Le film
Les bonus
Meilleur dvd Septembre 2013 ( 8 ème )
Ce que nous rapporte Aida Begic, vingt ans après la fin de la guerre en Bosnie, n’a rien de réjouissant. L’ économie ne s’en est toujours par remise, crise internationale en prime, et un processus de privatisations qui élimine les plus faibles. A l’image de cette grande sœur, Rahima, et de son adolescent de frère, Nedim, livrés au bon vouloir des «vainqueurs ».
On imagine que Rizo, l’employeur de la jeune femme a bénéficié des avantages collatéraux du conflit.
« On n’a pas grandi dans des caves, mais dans la guerre, contrairement à certains » répond Rahima à l’épouse du patron, qui tance à tout va. Si ce n’est pas la pègre, ça sent la magouille que Nedim mène lui aussi à sa manière, à l’insu de la sa sœur.
Quand elle découvre son double jeu, Rahima n’en dit rien. Ici on répond souvent aux questions pas d’autres questions. Aussi préfère-t-elle l’observer, l’épier, traque silencieuse au cœur d’un monde où la lumière ne pénètre plus.
L’image n’est de fait, jamais très rayonnante ; elle donne dans le gris (Nedim est souvent filmé dans la pénombre), le dessous des ponts et les terrains vagues. Mais la sourde entente qui unit la fille et le garçon réussit imperceptiblement à balayer tous les obstacles, et dieu sait qu’ils ne manquent pas.
Le pouvoir politique, omnipotent, rentre dans la cour des écoles et s’immisce dans l’intimité des gens. Trafic ou corruption, Aida Begic est souvent caméra à l’épaule, intrusive, persuasive, même si l’issue paraît bien compromise.
Elle y insère, subrepticement, quelques images d’archives, de l’époque, où les gamins jouaient dans les tranchées, ou chantaient devant des immeubles en ruine. Son propos me semble assez fort par ailleurs pour pointer du bout du doigt ce qui fut, et ses conséquences. La force de Marija Pikic(Rahima), son regard, portent bien tout le poids de cette vie contre laquelle elle fait front pour elle et son frère.
Un portrait de femme, ou de l’absence des hommes, « Djeca » donne une image très pessimiste sur l’avenir de la Bosnie. Des images et aussi des sons qu’elle entend du plus lointain de ces mauvais souvenirs : des pétards de la fête du nouvel an qui résonnent comme des rafales, un aspirateur, qui l’effraie … L’écho d’une sirène, d’une alerte. La guerre est terminée depuis 20 ans !
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LE BONUS
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Entretien avec la réalisatrice (30 mn). « Je me demandais quel sens cela avait d’étudier la réalisation alors que nous étions en état de siège, et qu’en sortant on risquait de se faire tuer à tout moment. Mais j’ai compris que les gens de Sarajevo risquaient leur vie pour aller voir des pièces de théâtre, des concerts ; pour eux l’art était aussi important que la nourriture. C’était une forme de résistance, de la dignité. »
Aida Begic parle ainsi de la préparation de son film, qu’elle pensait à l’origine moins sombre que le précédent « Premières neiges », mais au fur et à mesure qu’elle rencontre les adolescents dont elle veut parler, elle se rend compte que l’espoir a disparu, et les rêves aussi.
Elle évoque bien le phénomène des femmes isolés (tous les hommes sont morts à la guerre) dans un système alors patriarcal. « Elles se sont prises en charge, sont devenues très indépendantes ».Le tournage, les acteurs, sa façon de travailler (les comédiens n’ont pas le script final avant le tournage…), tout est dit …
Review Overview
Le film
Les bonus
Il faut beaucoup d’intelligence et de persuasion pour nous parler de l’état d’un pays à travers l’existence de deux êtres qui parlent peu, mais agissent beaucoup. C’est le coup d’œil de la réalisatrice bosniaque, qui part caméra à l’épaule, comme d’autres s’en vont découvrir le monde, pour regarder comment il va. L’actrice Marija Pikic le découvre de manière très intrusive, à travers son adolescent de frère qui a choisi une voie détournée pour s’en sortir. Ce sont les enfants de la guerre de Bosnie, et pour eux, elle n’est toujours pas terminée. Un sujet dur, mais qu’il faut voir pour savoir, et aussi peut-être ne pas les oublier.
Avis Bonus : Une rencontre avec la réalisatrice, tout à fait bienvenue
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