Synopsis: Deux hommes courent sur la plage à l’aube. Ils ont les mains liées derrière le dos. Au même moment, un hélicoptère survole frénétiquement les environs. MacConnachie et Ansel sont deux évadés qui doivent traverser des paysages sauvages et inhospitaliers. Pour cela, ils vont devoir affronter de nombreux obstacles pour survivre et échapper au mystérieux hélicoptère noir qui traque leurs moindres mouvements…
La fiche du DVD / Blu-Ray
Le film
Les bonus
Avant d’attaquer son chevalet le peintre fait des essais. Esquisses, ébauches, couleurs à tâtons. J’ai l’impression que Losey adopte une technique identique. Dans un lieu à peine localisé, il opte pour un western mi- teinte, puis aborde le film d’aventure avant de jouer un peu avec des soldats bien empêtrés dans leurs uniformes tout neuf.
Losey tâtonne.
L’ensemble est dépouillé. Des montagnes plus ou moins enneigées, et de vastes plaines où deux hommes courent à corps perdu, les mains liées dans le dos. Ils tentent d’échapper à la traque d’un hélicoptère insistant et morbide. Comme on ne sait rien de cet engin destructeur, on ne sait pas plus sur l’origine de ces deux hommes, si ce n’est leur fuite et cette chasse éperdue entre ciel et terre.
Robert Shaw déjà vieux lascar et Malcolm McDowell, encore inconnu, donnent la réplique à ces personnages schématiquement représentés dans leurs attributs : le plus vieux est coriace, un brin dérangé, le plus jeune, naïf et fougueux. Ces caractères évoluent très peu au fil des péripéties malgré les 110 minutes dans lesquelles Losey nous engage à partager leur destin peu commun.
Et bizarrement, pendant tout ce temps, malgré l’absence de dialogues suffisants, de réparties haletantes ou de séquences palpitantes, on ne s’ennuie pas vraiment. Il y a comme une aspiration hypnotique dans cette chasse à l’homme qui ne dit pas son nom et que la patrouille soldatesque surligne dans un dénouement de plus en plus violent.
Nos deux héros, extirpés du roman de Barry England, sont voués à une mort certaine. Ils sont devenus des bêtes traquées, mais le ton n’y est pas, même au milieu des flammes et de la mitraille. Ça tire dans tous les coins,et le vieux briscard de plus en plus fou rigole de sa triste destinée. Son compagnon d’infortune le suit encore, mais sans plus d’illusion que la mise en scène de Losey , imprévisible . Le final n’est pas forcément celui auquel on peut s’attendre ,mais le cadre est superbe et la neige, sans tache !
LES SUPPLEMENTS
- . « Le journal du cinéma » : émission du 22/11/1970 (8 mn) . Réalisation Philippe Collin et Pierre-André Boutang © 1970 – Ina. Dans cet entretien où la traduction est assurée par Bertrand Tavernier, Joseph Losey revient sur les thématiques et comportements de ses personnages. Il évoque brièvement le titre français de son film (en anglais : « Figures in a Landscape ») qui ne lui plait pas du tout. « Ils fuient bien évidemment, mais comme dans un cauchemar qui les ramène toujours au point d’où ils sont partis ».
Il s’explique sur le profil des deux personnages et du fait qu’on ne possède guère d’identification sur eux , ni sur le pays visé , l’Angola, le Vietnam, le Nigéria… « la vision est plus universelle que ça, si j’avais voulu faire un film sur le Vietnam, je l’aurais déterminé ainsi ».
- L’oiseau de proie par Michel Ciment (19 mn). Critique, directeur de la revue Positif, l’auteur de « Conversations avec Losey » revient sur la genèse de ce projet à la forme conceptuelle et analyse les thèmes clés du film en les reliant à l’œuvre du cinéaste…
Un film pour lequel Losey est allé jusqu’à se mettre lui-même en danger. Il se trouve dans le second hélicoptère pour suivre les prises de vue aériennes. « Les conditions techniques sont difficiles, et d’ailleurs les deux pilotes vont périr quelques mois plus tard l’un en Iran, l’autre en Irlande, sur des tournages de films ».
Jugeant le récit un peu trop raciste – surtout durant le contexte explosif de la guerre du Vietnam –, Joseph Losey confie la réécriture de l’histoire à l’un de ses acteurs principaux, Robert Shaw, également romancier.
Contrairement à son adaptation cinématographique, le roman original est lui beaucoup plus explicite : on apprend dès le départ que les héros se sont échappés d’un camp situé quelque part en Asie.
Avec Losey, cela devient « une fable, une allégorie qui raconte la condition humaine de manière camouflée. (…) On ne peut pas échapper ni s’échapper , trouver un asile. L’homme est condamné à la fuite » analyse Michel Ciment en reprenant l’écho de la confrontation, un thème qui a toujours intéressé Losey dit-il en citant « Accident » et « The Servant »
Le film
Les bonus
On peut s’en tenir aux apparences : deux hommes en fuite sont traqués par un hélicoptère. Pendant près de deux heures on suit cette cavale entre ciel et terre que Losey orchestre avec une étonnante dextérité. Il prend à témoin la Sierra Nevada pour nous tenir en alerte pendant tout ce temps où malgré l’absence de dialogues suffisants, de réparties haletantes ou de séquences palpitantes, on ne s’ennuie pas un instant. Cela va paraître très snob à certains, mais c’est aussi du cinéma et sans afficher du grand Losey, c’est du cinéma qui me parle. AVIS BONUS Un éclairage intéressant de Michel Ciment et quelques commentaires de Losey en personne
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