Synopsis: Un riche industriel milanais engage un détective privé pour enquêter sur le passé de sa femme. Se rendant à Ferrare, ville où Paola a vécu et fait ses études, l’homme apprend que plusieurs années auparavant, la jeune femme a aimé Guido, un modeste vendeur de voitures dont la fiancée a disparu suite à un tragique accident…
La fiche du film
Le Film
Les bonus
- DVD : 05 Juillet 2022 . –
Découvrir ce film soixante-douze ans après sa création, et rester sans voix, admiratif …
« Chronique d’un amour » est le premier long-métrage très inspiré, d’un gamin de 38 ans qui fait ses gammes en écoutant Visconti (« Les amants diaboliques » ) et Robert Siodmak ( « Les tueurs » ) .
Mais la partition de Michelangelo Antonioni est déjà très personnelle .
La rue y apparait de manière significative dans des scènes urbaines révélatrices d’un climat, d’une ambiance. Ici Milan entre le froid et la pluie que supporte sur ses épaules à la fourrure épaisse, la belle Paola.
Mariée à un riche industriel, elle vivote de réceptions en dîners mondains, pour tuer l’ennui et fuir les défilés de mode. Lucia Bosé débute elle aussi dans le métier et sa stature en impose déjà. J’imagine les comédiennes qui ont étudié sa démarche de femme fatale à son profil de dame si respectable.
Lucia Bosé épouse bien ce profil ambigu que Paola adopte au contact de sa jeunesse qui ressurgit bien malgré elle.
Son époux (Ferdinando Sarmi) se demande en effet quelle jeune fille était celle qui est devenue sa femme. Les premières conclusions de l’enquêteur privé demeurent assez vagues, mais le coup de pied dans la poussière restée sous le tapis est tout aussi révélateur que la panique qui s’empare de la belle.
Renouer avec Guido qu’elle n’a jamais oublié (Massimo Girotti) pour se battre contre les démons de son passé. Une histoire prodigieusement racontée dans la mise en scène d’Antonioni qui salue un couple très amoureux et nous laisse avec deux amants sacrifiés.
De ce film naturaliste, le cinéaste passe ainsi imperceptiblement à la veine noire d’un récit où la profondeur des personnages, leurs travers et leur attente, figurent l’expression d’un quotidien peu banal. Introspectif, il dessine des ambiances incertaines, des non-dits suspicieux, des regards interrogateurs.
A peine si Antonioni se charge d’en fournir des réponses. C’est son premier film, une longue vie de cinéma l’attend .
Les Suppléments
Courts-métrages de Michelangelo Antonioni
- « La Rayonne » (Sette canne, un vestito – 1949 – N&B – 10 mn)-Le processus de fabrication de la rayonne à Torviscosa, près de Trieste.- « Un majestueux édifice ressemblant à un château mystérieux ». Ainsi parle-t-on, des usines transformatrices à la fin de la seconde guerre mondiale.
La mise en scène de cette séquence est déjà très étudiée. L’usine en question ne se dévoile qu’au passage des convois de cannes. ( photo)
Tout le circuit de sa transformation en rayonne est là encore soigneusement filmée par Antonioni, dont la conscience populaire se révèle – comme dans le court-métrage suivant- à travers son observation des hommes et de leur nature.
Sans oublier la finalité de ces cannes à l’origine boueuse : confectionner des robes d’apparat qui font la mode du moment.
- « Nettoyage urbain » (1948 – N&B – 11 mn)-Les éboueurs et balayeurs de Rome à la fin de la Seconde Guerre mondiale ? « Ils font partie de la ville comme des choses inanimées, personne ne les regarde » dit le reportage sur cette communauté qu’Antonioni observe dans ses moindres gestes.
A leur passage les habitants jettent depuis les fenêtres leurs détritus empaquetés. Le jeune cinéaste apprend à filmer la rue, des scènes urbaines à l’écho toujours présent. Un très beau documentaire.
Le Film
Les bonus
Tout n’est pas forcément maîtrisé dans ce premier film d’un jeune cinéaste de 38 ans qui allait devenir par la suite une légende du septième art. Mais la patte est déjà présente, le style en devenir.
Et sans en rechercher ici les caractéristiques possibles, on remarque déjà un regard particulier sur les personnages, placés dans un cadre significatif de leur personnalité et des exigences que requièrent les rôles.
J’y vois ainsi l’influence de Robert Siodmak , cette manière de filmer au plus près des gens, prisonniers de leur histoire mais toujours à distance de ce qu’ils en rapportent. Une prodigieuse alchimie ici portée par Lucia Bosé qui débute elle aussi dans le métier . Mais sa stature en impose déjà. J’imagine les comédiennes qui ont calqué sa démarche assurée de femme fatale à son profil de dame si respectable.
Un exemple à suivre, à l’image de ce réalisateur néophyte qui fait ses gammes et compose un petit chef-d’œuvre !
AVIS BONUS
Deux courts documentaires d’Antonioni, expressifs et très parlants.