Coffret Ultra Collector. Nouvelle restauration.
Les penchants très affirmés de Brian de Palma pour son maître trouvent un aboutissement dans ce thriller sous influence hitchcockienne. « Vertigo », « Fenêtre sur cour », « Sueurs froides », je vous renvoie aux scènes référentes qu’il est toujours amusant de relever. Rien que le voyeurisme compulsif d’un protagoniste qui espionne l’intimité de sa voisine vous met immédiatement sur la piste. Ce goût prononcé pour le suspense, l’humour cynique, la manipulation, la sexualité trouble et les psychismes détraqués fait ici florès.
Un acteur à la rue (Craig Wasson) se retrouve du jour au lendemain locataire d’un luxueux appartement d’où il peut mater tout à loisir sa voisine exhibitionniste. Un décor approprié, avant la mise en scène, pour mettre à jour les travers de la dame, mais aussi ceux de son environnement plus que suspect.
Jack n’est pas seul sur les lieux. Un inquiétant personnage échafaude ainsi plusieurs stratagèmes pour approcher la femme, et même plus, bien qu’il n’y ait aucune affinité…
Dès lors, tout est sujet à caution. On ne sait jamais ce que fait l’intéressée, où elle va et à qui elle s’adresse constamment au téléphone, en insistant pour que son correspondant la rejoigne. Cette autre forme de suspense n’implique pas encore les grandes émotions du spectateur.
La perceuse ne s’est toujours pas mise en route, mais le voyeur tapi dans l’ombre attend son heure. Ce que redoute notre héros de plus en plus paniqué par ce qu’il voit et surtout ce qu’il comprend. La manière dont il a été manipulé relève autant de l’inconscience que de la supercherie.
De Palma l’illustre brillamment en tournicotant autour de son sujet, lui laissant à son tour le choix de sa doublure qu’il voit en toute impunité agir sous ses yeux. Il est le seul témoin du meurtre. Un acteur qui plus est voyeur, très étrange donc aux yeux du policier qui pencherait quand même plutôt pour le mari.
Mais allez savoir ce qui dans l’arnaque vous appartient et vous échappe. Le coup monté est de très belle facture, et notre claustrophobe en titre qui ne pouvait plus jouer Dracula se retrouve à nouveau au fond d’une tombe. Mais cette fois c’est pour de vrai.
Il y a eu des critiques plus acerbes sur le monde du septième art. Le coup d’œil du réalisateur me parait ici plutôt amusé, voire curieux d’un univers qu’il ne connaît pas totalement. La prestation de Mélanie Griffith en star du porno le conforte dans son exploration. Hitchcock n’est déjà plus dans ses préoccupations et j’ai même cru décerner un petit clin d’œil malicieux au « Chinatown » de Polanski. A vous de voir.
Collection coffret ultra collector
Les suppléments
- . Préface de Samuel Blumenfeld (8 mn). Il cite tous les codes hitchcockiens, de « Vertigo » à « Fenêtre sur cour » et assure que Brian de Palma « multiplie les références pour mieux leur dire adieu ».
- Entretien avec Joe Napolitano, 1er assistant réalisateur. Napolitano explique très bien en quoi consiste son travail, comment ont été abordées les scènes érotiques (« pour des scènes d’amour c’est déjà difficile, alors là …), les techniques employées pour filmer entre les deux maisons qui bien évidemment se trouvent à des kilomètres l’une de l’autre (beaucoup de travail en studio dans ce cas)…
De nombreuses scènes sont ainsi passées en revue avec à chaque fois les séquences filmées correspondantes. On apprend beaucoup, comme le travail sur l’enlacement sur la plage. Il a fallu du temps, de la patience, et finir en studio …
- Le réalisateur s’explique, par Laurent Bouzereau. Brian de Palma reprend dans différents chapitres la manière dont il a conçu son film. Je ne vous en rapporte que quelques extraits mais tout est à voir et à entendre.
. La séduction. Il raconte comment il était parti sur les traces d’une actrice du porno. Mais une fois l’une d’entre elles retenue, il constate « que son expérience l’avait dépossédée de son pouvoir de séduction ». De Palma ne sait plus trop à qui alors confier le rôle de la doublure, et l’insistance de Mélanie Griffith qu’il connaît très bien le convainc de faire un bout d’essai. Il sera concluant « mais Brian m’a permis de détruire cette bande, il n’y a aucune copie » prévient l’intéressée.
. La mise en scène
. Le mystère
. La polémique. A la sortie du film c’est quasiment un tollé général sur la manière de traiter les femmes. Deborah Shelton qui tient le rôle de la femme doublée par une star du porno est à l’époque abasourdie par tant de haine envers le film. « Comme si j’avais causé du tort aux femmes de la planète en jouant ce rôle. Je suis actrice, ce n’est pas à moi de juger un rôle selon ma propre morale. (…) C’était aussi le fait de nier que des femmes pouvaient être aussi des victimes ».
- « Double De Palma » par Susan Dworkin; Traduit pour la première fois en français, un voyage unique au cœur du tournage et du processus de création d’un réalisateur .Sur les 200 pages du livre, le remplissage est exclu. A chaque page, chaque paragraphe vous apprenez obligatoirement quelque chose.
La manière dont l’écrivain présente Mélanie Griffith est d’une tendresse amusante. « Aussi fine qu’une jonquille(…) des cheveux blonds à la punk hérissés sur la tête (…) c’était la plus jeune des quatre acteurs principaux, mais on pouvait devenir qu’elle avait plus vécu que tous les autres réunis ».
Et bien évidemment les anecdotes pullulent, sur le tournage et ses à-côtés, tandis que le réalisateur se prépare déjà à affronter la presse. Comme il a prévenu certains journalistes que son film seraIT sulfureux, les médias s’emparent de la rumeur et Susan Dworkin tartine avec allégresse sur la réaction assez jouissive me semble-t-il de Brian de Palma.
De nombreuses photos de tournage exclusives et inédites couronnent ce très beau parcours à la fois littéraire et cinématographique.
Le film
Les bonus
Très mal accueilli à sa sortie en 1984, ce film tient toujours toutes ses promesses. Le temps aidant, il y aurait encore beaucoup à dire sur l’addiction hitchcockienne de Brian de Palma, ici réglée quasiment définitivement dans une somme de références plus intéressantes les unes que les autres à soulever.
Rien que le voyeurisme compulsif d’un protagoniste qui espionne l’intimité de sa voisine vous met immédiatement sur la piste. Et son goût prononcé pour le suspense, l’humour cynique, la manipulation, la sexualité trouble et les psychismes détraqués fait ici florès.
Au passage on peut remarquer quelques petits coups de griffes au monde du cinéma, mais c’est plus en observateur que de Palma se permet de juger ses compères. Histoire de voire où va son petit monde, et de mieux l’accompagner par la suite. Ce qu’il fera …
Avis bonus
Beaucoup d'éclairages passionnants autour du réalisateur et du film , avec pour le coffret collector un bouquin qui se lit en un tour de main . 200 pages, des photos, des révélations ...
13 Commentaires
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