Synopsis: À l’époque où il incarnait un célèbre super-héros, Riggan Thomson était mondialement connu. Mais de cette célébrité il ne reste plus grand-chose, et il tente aujourd’hui de monter une pièce de théâtre à Broadway dans l’espoir de renouer avec sa gloire perdue. Durant les quelques jours qui précèdent la première, il va devoir tout affronter : sa famille et ses proches, son passé, ses rêves et son ego…
La fiche du Blu-Ray
Le film
Les bonus
Une célébrité du septième art redescend sur terre, mais ne trouve plus ses marques. Quand il était « Batman » Riggan survolait le monde et tous ses artifices. Aujourd’hui, sur la scène d’un grand théâtre new-yorkais, ils le paralysent. C’est un défi que se lance alors l’acteur déchu, revenir de nulle part pour dire qu’il existe.
La nouvelle de Carver dont s’inspire le cinéaste « Parlez-moi d’amour » est au cœur de la machination théâtrale qui broie d’instinct les feignants et les parvenus.
La célèbre critique du New York Time (Lindsay Duncan, petit rôle mais grand personnage) le rabâche autour d’elle et l’illumine dans une scène grandiose. Elle y fustige « ce que vous êtes, et ce que vous représentez, tous ces êtres, suffisants, pourris, gâtés, qui sans travailler font la profession d’artiste, et qui entre eux s’accordent des récompenses en or à leurs films pornographiques ».
Les Oscars applaudissent mais Alejandro González Iñárritu demeure dubitatif devant ce héros qu’il torture en vase-clos ( le début est pénible, et tourne en rond ) dans ce milieu très fermé qu’est la représentation et le paraître .
On y décèle les affres de la création, et l’égo malmené du comédien en perdition , des parcours gâchés, et des itinéraires sans issue que le cinéaste reprend à contre-chemin avec une maestria, une vista bien singulière.
Le surrégime des premiers échanges apaisé, nous voici dans les coulisses, parfaitement intégré à ce monde irréel que nous découvrons comme un parc d’attractions.
Mais c’est bien de vie et de mort dont il est maintenant question, et le manège qui tourne ne s’arrête pas forcément quand on le souhaite. Il y a pour ça des interprètes prodigieux, dont le rôle-titre, Michael Keaton personnage emblématique du film et de la pièce.
Si sa prestation boostée par les impératifs de sa dépression vaut tous les honneurs, on doit aussi à Edward Norton l’existence d’une véritable dramaturgie et d’une mise en scène qui s’appuie beaucoup sur le talent de l’acteur .Un fout la merde dans toute sa démesure et la déraison de son existence qui lui permet pourtant chaque fois de rebondir et d’assigner chaque être à sa juste place.
A cet égard j’ai beaucoup apprécié la manière dont Iñárritu aborde les rapports entre le père comédien et sa fille, en cure de désintoxication ( Emma Stone, que je n’arrive pas à saisir ). Jamais frontalement, toujours par l’entremise d’un tiers ou d’une exception. A l’image de cette bande son géniale qui libère le tempo d’une cymbale et la résonnance d’une caisse claire, jazzie en diable. Du grand art, jusqu’au bout !
LES SUPPLEMENTS
- Les coulisses du film (33 mn). Un titre de chapitre approprié, puisque l’on nous invite effectivement à parcourir l’arrière du décor, avec des scènes de lecture, de répétitions et de tournages, le tout agrémenté de nombreux commentaires. Et si une fois encore les membres de l’équipe se prononcent sur leurs camarades de travail, cette fois c’est pour raconter des choses intéressantes, loin du superflu de mon dieu comme j’aime travailler avec cet acteur …
« On a tous un birdman en nous » confie le réalisateur « une voix intérieure ». C’est ce qu’il explique à son équipe le premier jour de tournage, en rappelant la direction qu’il souhaite prendre « des plans larges, la fluidité ». « Je voulais en fait me confronter à mon propre ego (…) Il y a toujours dans ce film une méta-réalité qui parle ». Et les comédiens sont assez lucides quand ils se regardent le nombril .
Edward Norton : « Les acteurs ont une grande estime de soi ». Michael Keaton : « Quelqu’un que les gens viennent voir sur un grand écran, c’est dieu ». Naomi Watts : « Des gens complexés, (…) et leur suffisance, donc !… ».
Sur les origines du projet, Iñárritu voulait absolument Michael Keaton, autrement « je ne le faisais pas ».
« C’est un investigateur » dit du réalisateur, l’intéressé, « un instinctif brillant » surenchérit Naomi Watts. Le directeur de la photo Emmanuel Lubezki, complice depuis le premier film et le costumier (« il travaille comme un peintre ») sont également de la fête tandis qu’Iñárritu salue la performance de Keaton « qui a eu le courage de se mettre à nu, physiquement et intellectuellement ». Pour terminer le point de vue du compositeur Antonio Sanchez à qui l’on a demandé uniquement« des solos de percussions ».
- Entretien entre Alejandro González Iñárritu et Michael Keaton (14 mn). Là encore ça ne tient pas de la langue de bois, mais d’une analyse fort judicieuse et simple du film, agrémentée par des scènes de tournage. Déjà que le comédien prévient que « trop parler du film est dangereux, parce qu’il est expérimental. Chacun aura sa propre vision des choses ».
« Ca parle de la poursuite perpétuelle d’une illusion » relève son réalisateur « qui nous a été inculquée par le système des valeurs de ce monde ».« Je ne me suis jamais senti aussi éloigné d’un personnage, mais je le comprenais à bien des niveaux » confesse Michael Keaton, « il est tellement ridicule et humain, réel, tellement viscéral. C’est effrayant à jouer, mais tellement excitant ».
Review Overview
Le film
Les bonus
Il faut pouvoir se défaire du triomphe de ce film aux Oscars pour l’appréhender comme un film normal qu’il n’est pas. Sous les apparences d’une histoire qui se répète autour de l’homme en quête de sa propre identité, Alejandro González Iñárritu élabore l’aventure de toute une vie, dans une parabole artistique empruntée à la nouvelle de Carver « Parlez-moi d’amour ». Mais le cinéaste va bien au-delà en reprenant le thème de l’homme oiseau qui fit le succès de ce comédien aujourd’hui sur le déclin et qui tente de se rattraper sur la scène de Broadway. De cette paire d’ailes dont il voudrait se séparer pour voler plus librement, Michael Keaton donne le sens de ce film en s’interrogeant sur sa condition médiocre d’acteur triste et égoïste. Avec à ses côtés Edward Norton en fout la merde remarquable.
Avis bonus
Une très belle incursion dans les coulisses, des commentaires judicieux, du bon boulot là encore
Film audacieux dans lequel on peut effectivement entrer difficilement mais le scénario apporte vite un événement qui donnera le ton souvent jubilatoire. Il est osé (même si ce n’est pas une première) de faire un seul plan séquence mais là où on pourrait se sentir enfermé, on est au contraire totalement libre. On est immergé dans le film avec une caméra qui suit les acteurs dans les couloirs, les coulisses, la scène du théâtre mais aussi dans la rue, les bars et sur les toits du quartier. Film oscarisé et c’est mérité qui pose la question du devenir d’un acteur : que faire après avoir été un héros très célèbre ? C’est aussi une réflexion sur ses états d’âmes et ses démons intérieurs et en même temps une satyre féroce sur l’ego des acteurs, sur les critiques et sur la culture intello. Une fin de film bien intéressante aussi avec un joli clin d’oeil final. La musique déstructurée est à l’image du film avec beaucoup de percussions. De très beaux seconds rôles par ailleurs. Quatre étoiles pour moi aussi.