Synopsis: Interdit aux moins de 16 ans avec avertissement Emi, une enseignante, voit sa carrière et sa réputation menacées après la diffusion sur Internet d’une sextape tournée avec son mari. Forcée de rencontrer les parents d'élèves qui exigent son renvoi, Emi refuse de céder à leur pression, et questionne alors la place de l'obscénité dans nos sociétés.
La fiche du film
Le film
Les bonus
Ours d’or au Festival de Berlin 2021
Une institutrice à Quimperlé – Gabrielle Russier (*) … Deux enseignantes renvoyées de leurs établissements pour avoir contrecarré aux bonnes mœurs établies par la société. De tout temps, des professeurs ont subi ce genre d’avanies. Et dans tous les pays comme nous le rappelle Radu Jude qui bien que s’appuyant sur une fiction, prend à témoin l’humanité tout entière.
Les étreintes torrides et amoureuses d’Emi atterrissent sur les réseaux sociaux. Enseignante respectée, la jeune femme ( Katia Pascariu) a filmé les scènes en compagnie de son mari. La publication sur Internet demeure un mystère, mais Emi sent confusément que le pire est à venir.
Les images diffusées sont de l’ordre de la pornographie. Elles l’accompagnent dans sa déambulation dans Bucarest où Radu Jude qui n’élude rien du contenu , note à chaque passage l’environnement tout aussi nauséeux de la capitale.
Avant même de s’interroger sur la portée de ce type de rapports sexuels , le cinéaste pose ainsi en préambule le droit au respect, à l’intimité et à l’ordre personnel . Tout ce que s’imaginait Emi dans le confort intellectuel de sa mission que le cinéaste inscrit dans un abécédaire assez déglingué, fait d’aphorismes, d’images d’archives et de vérités toutes faites.
C’est la partie centrale du film, à priori sans rapport avec le récit et pourtant si vraie dans ce qu’elle raconte du malaise sociétal du moment. Quand l’homme se réjouit du naufrage du Titanic « qui prouve qu’il existe encore un océan ».
Ou pour la tristesse des robots appelés à supprimer l’empathie humaine dans les conflits armés… Emi peut-elle se réfugier dans cette bulle surréaliste quand la horde des parents, le couteau entre les dents, lui intime de quitter leur école si prestigieuse, non sans lui avoir infligé une nouvelle diffusion du sextape.
La méchanceté liée à la bêtise, Radu Jude taille dans le gras auquel échappent quelques individus indifférents, bienveillants, amis… On ne sait trop, à l’image de ce final très ouvert par le cinéaste qui laisse en quelque sorte au spectateur le soin de prendre parti. Le débat est lancé, le film ne s’arrête pas …
(*) Gabrielle Russier. À la suite d’une liaison amoureuse avec un de ses élèves âgé de seize ans, cette professeur de lettres est condamnée à un an de prison. Elle se suicide dans son appartement marseillais.
LES SUPPLEMENTS
- « La mise à mort du maréchal Antonescu» (9 mn).Elle a été filmée en 1946 par Ovidiu Gologan. En 1994 Sergiu Nicolaescu réalise « The Mirror » un biopic dans lequel il tente de le réhabiliter l’ancien homme fort du pays.
Ce court métrage compare les deux exécutions …
- « Plastic Semiotic » ( 22 mn ) . Des jouets se jouent de nos propres réflexes et habitudes pour nous dire ce que nous sommes . Pourquoi pas !
- Rencontre avec Radu Jude au Festival de la Rochelle ( 68 mn) – Olivier Père directeur de l’unité cinéma Arte anime cette rencontre en compagnie de Carlo Chatrian , directeurs artistique de la Berlinale.
» Je suis un produit du cinéma français » dit en substance le réalisateur qui explique ainsi au passage les extraits d’une chanson de Bobby Lapointe qu’il avait apprécié à l’époque aussi en tant qu’acteur. Le reste n’est que digressions heureuses et intelligentes sur le cinéma en général et parfois sur ce film si particulier. Il a été tourné au moment du Covid et il a fallu s’adapter bien souvent aux conditions sanitaires.
Le film
Les bonus
Sur un sujet de société très présent ( la diffusion de sextapes, leurs répercussions) Radu Jude passe en revue les travers de la société roumaine et à travers elle, de l’humanité tout entière.
C’est concis mais très particulier dans la mise en forme du sujet réparti sur trois niveaux : la vision sans retenue de la fameuse sextape – vidéo porno – que la victime porte lourdement dans sa déambulation urbaine où tous les codes de la ville lui renvoient des signaux aussi nauséeux que ce qu’on lui reproche.
Le point ultime étant le jugement de cette femme, enseignante, par les parents d’élèves qui souvent par ignorance, bêtise et méchanceté la cloue au piloris.
Entre les deux Radu Jude illustre le mal être du pays en stigmatisant les lieux communs d’un abécédaire assez déglingué, fait d’aphorismes, d’images d’archives et de vérités toutes faites. C’est d’une totale pertinence, et d’un humour destructeur.
AVIS BONUS
Deux courts métrages bien particuliers chaque fois et une rencontre au festival de La Rochelle où le cinéma prend toute sa place.